Les États-Unis s'apprêtent à bousculer les négociations de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne. Le président Barack Obama devrait confirmer en juin que son administration lance ses propres pourparlers commerciaux avec Bruxelles, un développement qui risque de damer le pion au gouvernement Harper qui planche sur un accord depuis quatre ans.

L'annonce du président américain devrait être faite en compagnie du président de la Commission européenne, Manuel Barroso, à l'issue du sommet du G8 qui aura lieu en juin en Irlande du Nord.

Dans les milieux diplomatiques européens, on a déjà fait savoir aux autorités canadiennes que les négociateurs européens consacreront l'essentiel de leur énergie à conclure un traité avec les États-Unis dès qu'on aura donné le coup d'envoi aux pourparlers. Les négociations avec le Canada, qui piétinent depuis plusieurs mois, seront reléguées au deuxième rang.

«Dès que le président Obama donnera le coup d'envoi aux pourparlers, il est évident que les négociateurs européens auront la tête ailleurs», a confirmé une source bien au fait des derniers rebondissements dans ce dossier.

Ralentir les négociations

Le premier ministre de la Grande-Bretagne, David Cameron, qui sera l'hôte du sommet du G8, a déjà laissé entendre que l'entrée en scène des États-Unis risque de ralentir encore davantage le rythme des négociations entre le Canada et l'Union européenne (UE).

Le président Obama avait déjà exprimé son intérêt de négocier un tel accord avec l'UE au début de l'année. Mais il n'avait pas précisé de calendrier quant au début des négociations.

En visite officielle à Washington, il y a deux semaines, M. Cameron s'est fait l'apôtre d'un accord transatlantique afin de créer l'une des plus grandes zones de libre-échange au monde. Le président Obama a alors indiqué qu'il espérait lancer les discussions avec l'UE «dans les prochains mois».

Mais avant d'entreprendre des négociations, le Parlement européen et les États membres doivent approuver le mandat de discussions. Aux États-Unis, le Congrès américain doit être consulté.

Pierre d'achoppement

La principale pierre d'achoppement dans les négociations entre le Canada et l'UE demeure l'accès au marché européen pour les producteurs de boeuf et de porc canadiens. Plusieurs estiment que seule l'intervention politique du premier ministre Stephen Harper permettrait de surmonter cet obstacle.

L'UE serait prête à accepter des importations maximales de boeuf de 40 000 tonnes par année, mais le Canada exigerait un plus grand accès, soit 100 000 tonnes.

Au bureau du ministre du Commerce international Ed Fast, on assure que les négociations se poursuivent. Mais on refuse aussi d'évoquer un calendrier pour la conclusion d'une entente. Les négociateurs canadiens se trouvent d'ailleurs à Bruxelles depuis une semaine afin de poursuivre les pourparlers avec leurs homologues dans l'espoir de tenter d'aplanir les différends qui subsistent.

Selon une étude menée par des gens d'affaires pour déterminer les avantages d'un tel traité, le Canada pourrait bénéficier de retombées économiques de 12 milliards de dollars par année en libéralisant le commerce avec l'UE.

Une source qui s'intéresse aux négociations a indiqué à La Presse que les gens d'affaires en Europe sont de plus en plus sceptiques qu'un accord de libre-échange entre le Canada et l'UE aboutisse un jour.

- Avec Hugo de Grandpré