Le chef du NPD, Thomas Mulcair, a lui aussi été victime d'une tentative de corruption de la part de Gilles Vaillancourt lorsqu'il était en politique provinciale, a appris La Presse.

Selon nos informations, Thomas Mulcair, actuel chef du Nouveau Parti démocratique, a rencontré les enquêteurs à deux reprises et leur a même «remis une déclaration écrite assermentée».

Son identité est néanmoins tenue secrète dans les documents obtenus par La Presse concernant l'enquête Honorer.

Thomas Mulcair leur a raconté que Gilles Vaillancourt «l'a joint» pour l'inviter à une rencontre «dans un bureau isolé». La date est masquée. «Il s'est assis en face de lui, en tenant quelque chose dans sa main et a dit vouloir l'aider [...] tout en montrant l'enveloppe», lit-on dans le compte rendu rédigé par les policiers.

Le politicien dit avoir «physiquement reculé, car la situation le rendait physiquement inconfortable», puis il a mis un terme à l'entretien. Il a précisé que l'enveloppe était blanche. Il ne peut pas confirmer s'il «s'agissait d'argent ou d'une lettre, mais pour lui il était clair que c'était de l'argent».

Thomas Mulcair a été élu à trois reprises sous la bannière libérale provinciale dans Chomedey - en 1994, 1998 et 2003. Ses relations houleuses avec Gilles Vaillancourt ont connu plus tard d'autres rebondissements. Dans le magazine L'actualité en 2011, Thomas Mulcair a révélé que ses ennuis ont débuté lorsqu'il a voulu légiférer pour protéger les milieux humides.

«C'est là que ça a commencé à mal aller avec le premier ministre [Jean Charest]. Il y avait beaucoup de terrains en jeu à Laval notamment, et Charest m'a dit qu'il ne pouvait pas faire ça au maire Gilles Vaillancourt. On avait trop besoin de lui pour les élections.»

Au bureau de Thomas Mulcair, on se borne à dire que les «déductions de La Presse étaient bonnes». Toutefois, on s'est refusé à tout commentaire, compte tenu du fait que «M. Mulcair est un élu» et que le dossier est devant les tribunaux.

David Cliche très loquace

Pour sa part, l'ex-ministre péquiste David Cliche s'est montré très loquace avec les policiers de l'enquête Honorer.

«J'ai été pendant huit ans ministre responsable de Laval. Donc, je connaissais bien le système du maire, que j'ai décrit à l'UPAC», a-t-il dit à La Presse lundi, en marge d'une réunion d'anciens parlementaires.

Selon le rapport des policiers, auquel La Presse a eu accès, David Cliche a longuement évoqué ses démêlés avec l'administration Vaillancourt, notamment après la publication d'une carte de milieux humides qui entravait au moins un projet immobilier de «trois tours».

Bien que caviardé, le document laisse surtout entendre qu'on aurait tenté d'offrir une enveloppe à David Cliche en 1993, après qu'il eut «réglé» un dossier. Il n'était pas encore élu dans Vimont.

«Combien on te doit pour ça?», lui aurait alors demandé le chef de cabinet du maire, qui lui a aussi suggéré de «faire une facture au montant de son choix». M. Cliche «a refusé catégoriquement», lit-on dans le résumé des policiers.

10 000$ à son insu?

Toujours à propos d'enveloppes, un ingénieur lavallois assure, dans une entrevue accordée à La Presse hier, qu'il a porté une enveloppe contenant 10 000$ comptant à Michel Goyer, organisateur politique de David Cliche, candidat du Parti québécois dans Vimont, lors de la même campagne de 1994.

L'été dernier, Radio-Canada a évoqué cette histoire de «don», mais l'ingénieur en question, Claude Vallée, avait refusé de confirmer. Goyer, Cliche et Vaillancourt avaient tous nié.

«On n'est pas d'accord avec ce que dit Claude Vallée, a réitéré Michel Goyer, lundi, en entrevue avec La Presse. L'a-t-il gardé dans ses poches ou donné à d'autres? S'il veut faire une vendetta, j'ai pas le goût d'embarquer là-dedans...»

«Cela ne tenait pas la route, les policiers sont revenus me voir une deuxième fois pour me dire on ferme les livres, vous êtes blancs comme neige!», a renchéri David Cliche à La Presse.

Mais Claude Vallée maintient mordicus la version qu'il a livrée aux policiers. Gilles Vaillancourt lui aurait confié une enveloppe contenant 10 000$ avec pour tâche de l'apporter au local de campagne du candidat péquiste.

«Je m'en souviens comme des images de l'assassinat de Kennedy! J'étais du côté droit de Michel Goyer. Il a pris l'enveloppe et l'a glissée sous son cartable. David Cliche est apparu. Il m'a demandé ce que je faisais là. Ce n'était pas à moi de lui parler du 10 000$, mais à Goyer de le faire», a-t-il affirmé à La Presse.

David Cliche n'a pas rappelé La Presse, hier.

- Avec la collaboration de Denis Lessard