Survol des principales mesures dévoilées dans le rapport Protection des personnes mineures contre les abus sexuels, préparé par les évêques canadiens.

RENCONTRER LES VICTIMES

L'une des recommandations les plus marquantes du rapport Protection des personnes mineures contre les abus sexuels, en préparation depuis quatre ans, est qu'un évêque peut passer outre l'avis de ses avocats et rencontrer les croyants qui se plaignent d'un abus sexuel. « On ne dit pas de toujours rencontrer les plaignants, mais on dit qu'il faut tenir compte de la dimension pastorale, des besoins des fidèles, pas seulement de l'avis des avocats », explique Paul-André Durocher, évêque de Gatineau, qui a été chargé par la Conférence des évêques catholiques du Canada (CECC) d'expliquer les nouvelles lignes directrices. Christian Lépine, l'archevêque de Montréal, estime quant à lui que si des causes sont devant les tribunaux, l'évêque devra déléguer quelqu'un, un vicaire, un travailleur social ou un psychologue, pour écouter le plaignant. Le refus de feu Jean-Claude Turcotte, archevêque de Montréal jusqu'en 2012, de rencontrer certains plaignants a souvent été critiqué dans les médias.

UN CAS QUI FAIT RÉAGIR

En 2008, Philippe de Maupeou, curé de la paroisse de l'Immaculée-Conception, dans le Plateau, a été condamné à six mois de prison avec sursis pour des attouchements sur une fillette de 8 ans. Le cardinal Jean-Claude Turcotte a décidé de lui payer des études universitaires à Ottawa pour que le père de Maupeou puisse assumer des tâches administratives au diocèse. L'histoire de la « bourse » a fait les manchettes et le prêtre pédophile a dû défroquer. Un tel scandale ne pourrait se produire aujourd'hui, selon Christian Lépine. « S'il y a une condamnation criminelle pour un abus, on ne peut plus faire confiance au prêtre. On n'en est plus là. Selon le crime, on choisira de le rendre à l'état laïque ou alors de lui imposer une pénitence de prière dans une résidence pour prêtres. » Un prêtre acquitté ou qui n'est finalement pas accusé au criminel pourrait par contre être relégué à des tâches administratives si son évêque a toujours des doutes, selon Mgr Durocher.

MEILLEURE VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS

Les lignes directrices insistent aussi sur la vérification des antécédents judiciaires, ainsi qu'auprès des anciens employeurs, des bénévoles. « On fait déjà assez systématiquement ces vérifications quand un prêtre passe d'un diocèse à un autre, dit Mgr Durocher. Dans deux semaines, il va y avoir une réunion de représentants de tous les diocèses pour voir comment cette recommandation sera appliquée dans le cas des laïcs. » Mgr Lépine a lancé voilà deux ans un projet de « pastorale responsable » dans 50 des 200 paroisses de Montréal pour évaluer les antécédents des bénévoles, entre autres. « Depuis un mois, toutes les paroisses doivent le faire, dit Mgr Lépine. Pour le moment, ce sont les nouveaux. On est encore en train de réfléchir à ce qui sera fait comme évaluation pour les bénévoles existants. »

MIEUX ACCUEILLIR LES PLAINTES

La priorité numéro un de Mgr Lépine dans l'application des nouvelles lignes directrices est l'accueil des plaintes. « On a déjà une ligne téléphonique. Maintenant, il y en aura une en français et une en anglais, en plus d'une adresse courriel, dont on fera la publicité. On va aussi officialiser une cellule composée d'un avocat, d'un ancien policier, d'un médecin et de responsables de l'Église, qui évalue actuellement la crédibilité des allégations, mais qui dorénavant fera enquête chaque fois, même s'il semble s'agir d'un malentendu. Quand il s'agit d'un mineur, on transmet les informations immédiatement à la police. Quand c'est un adulte qui porte plainte pour quelque chose qui s'est produit quand il était enfant, on va lui suggérer d'aller voir la police. Et si l'enquête montre que ça semble vrai, on va retourner le voir pour tenter de le convaincre de porter plainte à la police. »