Dans ce rapport rendu public jeudi, à quatre jours d'un scrutin au Québec où la lutte est très serrée entre la Coalition avenir Québec (CAQ) et le Parti libéral du Québec (PLQ), le directeur parlementaire du budget (DPB) brosse un portrait positif de la gestion des finances publiques au Québec, une des rares provinces à afficher un surplus budgétaire alors que l'économie fonctionne à plein régime.

Dans son rapport de 40 pages, M. Giroux estime que toutes les autres provinces devront reprendre le contrôle de leurs finances en augmentant les impôts, en réduisant les dépenses ou encore en effectuant une combinaison de ces deux mesures pour un montant équivalant à 18 milliards de dollars afin de stabiliser le ratio consolidé de leur dette accumulée par rapport à leur produit intérieur brut (PIB).

« Pour l'ensemble des administrations infranationales, la politique budgétaire actuelle n'est pas viable à long terme. Le DPB estime que des augmentations permanentes des impôts et des taxes ou des réductions permanentes des dépenses correspondant à 0,8 % du PIB (18 milliards de dollars, en dollars courants) seraient nécessaires pour stabiliser à long terme le ratio consolidé de la dette au PIB des administrations infranationales à son niveau actuel, soit 25,7 % du PIB », peut-on lire dans son rapport.

Selon le DPB, la situation budgétaire est telle au Québec que l'on pourrait même envisager de réduire à nouveau le fardeau fiscal des contribuables ou encore augmenter les dépenses dans les missions essentielles de l'État telles que la santé ou l'éducation sans mettre en péril la santé financière de la province.

« Sauf au Québec, les politiques budgétaires des provinces et des territoires ne sont pas viables à long terme. Selon nos estimations, les mesures requises pour assurer la viabilité financière varient considérablement, de seulement 0,1 % du PIB provincial en Colombie-Britannique à 12,0 % du PIB territorial dans les territoires. »

- Extrait du rapport du directeur parlementaire du budget

« À l'inverse, nous estimons que l'administration infranationale du Québec dispose d'une marge de manoeuvre financière équivalant à 1,6 % du PIB provincial et pourrait ainsi augmenter ses dépenses ou réduire les impôts et les taxes tout en maintenant la viabilité budgétaire », peut-on également lire dans le rapport.

En mars, le gouvernement Couillard a présenté un quatrième budget équilibré de suite. En fait, Québec a affiché un surplus de 2,4 milliards de dollars en 2017-2018, de 2,361 milliards en 2016-2017 et de 2,191 milliards durant l'exercice 2015-2016.

LEITÃO RAVI

Joint par La Presse, vendredi, le ministre des Finances Carlos Leitão a soutenu que les conclusions du DPB démontrent que le gouvernement Couillard a pris les bonnes décisions dès son arrivée au pouvoir pour sortir la province de l'ornière des déficits et que la rigueur budgétaire du début du mandat rapporte maintenant des dividendes.

« Je suis extrêmement ravi et très content de voir les conclusions du DPB. L'an dernier, le DPB avait déjà indiqué que le Québec était une des seules provinces qui a des finances publiques structurellement viables à long terme. Et il confirme encore une fois cette année que nous sommes la seule province. »

-  Carlos Leitão, ministre des Finances du Québec

« Cela confirme aussi ce que d'autres ont déjà dit, notamment l'agence Bloomberg et d'autres analystes financiers », a dit M. Leitão.

À titre de comparaison, le gouvernement de l'Ontario, qui nage dans l'encre rouge depuis plus d'une décennie, prévoit que le déficit de l'exercice financier en cours atteindra les 15 milliards de dollars. Selon le ministre des Finances de l'Ontario, Vic Fedeli, la province pourrait mettre quelques années encore avant de renouer avec l'équilibre budgétaire.

L'Alberta, autrefois le moteur économique du pays, a été durement éprouvée par la chute des prix du pétrole. Le gouvernement albertain multiplie les déficits depuis cinq ans. Il ne prévoit pas éliminer ce boulet financier avant l'exercice financier 2023-2024.

Selon le ministre Leitão, la discipline budgétaire dont a fait preuve le gouvernement Couillard depuis quatre ans donne aussi au Québec la marge de manoeuvre nécessaire pour affronter les turbulences économiques provoquées par les politiques protectionnistes de l'administration Trump, entre autres.

« Ce rapport indique que les autres provinces vont avoir des décisions difficiles à prendre tôt ou tard. Alors non seulement nous avons pris les bonnes décisions au bon moment, mais nous avons aussi le Fonds des générations depuis 2006. C'est un outil unique au Canada. Ce fonds compte déjà un montant respectable de 12 milliards de dollars. Cela nous permet d'avoir un ratio de dette/PIB à la baisse », a dit le ministre.

OTTAWA EN DÉFICIT

Le gouvernement fédéral, quant à lui, nage aussi dans l'encre rouge depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux de Justin Trudeau en 2015. Le déficit devrait atteindre 18 milliards de dollars en 2018-2019, et le ministre des Finances Bill Morneau ne prévoit pas un retour à l'équilibre budgétaire à court terme, même si les libéraux avaient promis durant la campagne électorale de 2015 des déficits modestes ne dépassant pas les 10 milliards par an et un retour à l'équilibre durant la dernière année d'un premier mandat, soit en 2019.

Malgré tout, le DPB estime que la politique budgétaire du gouvernement Trudeau est viable à long terme, étant donné que le ratio de la dette par rapport au PIB est stable à environ 31,1 %.

« Le DPB estime que le gouvernement fédéral pourrait augmenter les dépenses ou réduire les impôts et les taxes, de manière permanente, dans une proportion correspondant à 1,4 % du PIB (29 milliards de dollars) tout en maintenant à terme la dette nette au niveau actuel de 2017, qui correspond à 31,1 % du PIB », peut-on lire dans le rapport.