L'homme considéré comme le responsable de la fusillade meurtrière de dimanche soir à Toronto s'appelle Faisal Hussain, ont annoncé les autorités policières, lundi. Et sa famille soutient qu'il a souffert toute sa vie de graves problèmes de santé mentale, y compris de psychose et de dépression.

Dans un communiqué, la famille Hussain a exprimé sa dévastation devant cette «violence insensée».

«Notre fils avait des problèmes de santé mentale importants, et a été aux prises avec des psychoses et des dépressions pendant toute sa vie», a déclaré la famille dans un communiqué transmis quelques minutes après que la police eut identifié l'individu.

«Bien que nous avons fait de notre mieux pour l'aider pendant cette vie de difficultés et de douleur, nous n'aurions jamais pu imaginer cette issue dévastatrice et destructrice.»

La famille exprime ses plus sincères condoléances aux proches des personnes touchées par les «actions horribles» de Faisal Hussain.

L'homme de 29 ans a été retrouvé sans vie dans le secteur de la fusillade, dans le quartier Greektown, après avoir échangé des coups de feu avec la police, a précisé l'Unité des enquêtes spéciales, qui examine les incidents impliquant la police lorsqu'une personne est tuée ou blessée.

La police tentait toujours, lundi, de déterminer le mobile de cette fusillade.

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Faisal Hussain a été retrouvé sans vie dans le secteur de la fusillade.

Une aspirante infirmière et une fillette

La fusillade a coûté la vie à une femme de 18 ans, Reese Fallon, et à une fillette de 10 ans, en plus de 13 autres personnes qui ont été blessées. La famille de la fillette de 10 ans n'a pas voulu dévoiler son nom pour l'instant, a indiqué la police.

La famille de Reese Fallon a précisé dans un communiqué qu'elle était dévastée et demandait que l'on respecte sa vie privée. Le député libéral fédéral torontois Nathaniel Erskine-Smith affirme que Mme Fallon était une militante «passionnée et pleine d'énergie».

Selon des publications sur les médias sociaux, Reese Fallon avait obtenu en juin son diplôme d'une école secondaire du quartier.

Une photo publiée sur ce qui semble être la page Facebook de son père indique que l'adolescente devait amorcer en septembre des études en sciences infirmières à l'Université McMaster de Hamilton. «L'école secondaire: réglé... Prochain arrêt: les soins infirmiers à McMaster», a écrit Doug Fallon sur une photo de sa fille, tout sourire. «Félicitations Reese... Tellement fier!»

Le chef de la police, Mark Saunders, a précisé que les 13 blessés étaient âgés de 17 à 59 ans. «Nous ne savons pas pourquoi c'est arrivé», a admis M. Saunders en conférence de presse. «L'enquête elle-même évolue rapidement, c'est très nouveau, il faudra du temps.»

La fusillade a commencé vers 22 h, dimanche, dans le quartier animé de Greektown, un secteur où l'on retrouve des restaurants, de petites entreprises et des résidences familiales. La «police des polices» en Ontario a indiqué que le tireur s'était déplacé le long de l'avenue Danforth tout en tirant autour de lui, en cette belle soirée d'été dans la métropole canadienne. L'Unité des enquêtes spéciales a précisé que l'homme avait ensuite échangé des coups de feu avec des policiers, et qu'il a finalement été retrouvé sans vie dans le secteur.

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Reese Fallon

Un quartier paisible

Lundi matin, plusieurs pâtés de maisons au coeur de Greektown étaient entourés de rubans jaunes de la police et presque toutes les entreprises locales étaient fermées. Beaucoup de ceux qui ont été témoins de la fusillade ont relaté le chaos pendant l'attaque.

Lenny Graf, qui avait mangé dimanche soir dans un restaurant du quartier, a raconté lundi qu'il regardait son fils de neuf ans et un ami jouer autour d'une fontaine à proximité lorsque les tirs ont commencé vers 22h. «Mon premier instinct a été d'essayer de trouver Jason, et je l'ai vu accroupi derrière la fontaine, et j'ai remarqué que le tireur avait fini de tirer là et qu'il s'éloignait», a-t-il dit. «J'ai attrapé Jason et je l'ai emmené dans la ruelle, nous avons couru à l'arrière du restaurant pour constater que l'ami de Jason était là en sécurité, tout comme ma femme.»

Valia Dsaliou, qui travaille dans une station de radio de langue grecque du quartier, a soutenu que la communauté très soudée était ébranlée par la tragédie. «C'est comme un petit village pour nous, ici», a-t-elle dit. «C'est quelque chose que nous ne pouvions même pas imaginer, mais c'est arrivé. Mais on ne sait pas pourquoi c'est arrivé, ou ce que tout cela est censé signifier pour nous.»

Des témoins ont publié de nombreuses photos et vidéos en ligne, y compris une vidéo qui semble montrer un homme, vêtu de noir et portant une sacoche, faisant quelques pas avant de lever les bras devant lui alors que des coups de feu retentissent. Cette vidéo a été publiée tard dimanche soir sur Instagram par l'utilisateur ↋arilanise, qui semble avoir depuis supprimé son compte.

Un résidant du quartier, Gord Cheong, a raconté que sa femme et lui étaient à la maison lorsqu'ils ont entendu une commotion. «Nous avons entendu des claquements juste avant d'aller au lit, hier soir, et ma femme s'est tournée vers moi et a dit: »Qui diable allume des feux d'artifice à cette période-ci de l'année?«»

Une autre résidante de Greektown, Jayme Milligan, âgée de 21 ans, s'apprêtait elle aussi à aller se coucher quand elle a appris la nouvelle. Elle a reçu un coup de téléphone paniqué de son frère, qui rendait visite à un ami à un pâté de maisons de la fusillade. En allant cueillir son frère, elle a vu des voitures de police alignées sur des pâtés de maisons entiers, et des résidants ébranlés qui se précipitaient chez eux pour se réfugier. «C'était comme irréel.»

THE CANADIAN PRESS

Des passants ont écrit un message d'espoir sur un immeuble en rénovation sur l'avenue Danforth.

Réactions politiques

À l'Assemblée législative de la province, le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, a déclaré que l'événement était non seulement tragique, mais «devrait aussi être une source de colère».

M. Ford a par ailleurs souligné l'importance de fournir à la police «les outils et les ressources nécessaires pour faire leur travail».

«Et nous travaillerons avec nos homologues municipaux et fédéraux pour identifier, appréhender et condamner ceux qui commettent ou qui prévoient commettre des violences», a-t-il ajouté.

Le maire de Toronto, John Tory, a qualifié la fusillade d'acte «indescriptible» et a déclaré que le moment était venu de faire face à l'augmentation des violences par armes à feu dans la métropole, qui a connu une vague de fusillades ces dernières semaines.

«Pourquoi quelqu'un dans cette ville a-t-il besoin d'un pistolet?», s'est-il interrogé dans un discours lundi matin au conseil municipal. «Je sais que répondre à des questions comme celle-ci n'éliminera pas complètement ces tragédies, mais même si nous pouvons prévenir un seul de ces incidents, alors, à mon avis, c'est une discussion qui vaut la peine d'être tenue très bientôt.»

Le premier ministre Justin Trudeau a envoyé une déclaration de soutien sur Twitter, tôt lundi matin. «Mes pensées accompagnent les personnes touchées par la tragédie qui a eu lieu la nuit dernière sur l'avenue Danforth, a-t-il écrit. Je souhaite un prompt rétablissement aux personnes blessées. Les Torontois sont forts, résilients et courageux, et nous les appuierons en cette période difficile.»

Le chef du Nouveau Parti démocratique fédéral, Jagmeet Singh, a indiqué que son coeur se tournait vers tous ceux qui ont été touchés par la fusillade, y compris les premiers répondants. Avant d'être élu chef du NPD fédéral, M. Singh était député provincial dans la grande région de Toronto depuis 2011.

Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a voulu «condamner et dénoncer» ce «geste de violence - une «terrible attaque» contre la métropole. «Mes pensées vont aux victimes, aux blessés et à leurs proches. Nous sommes de tout coeur avec les Torontoises et les Torontois, nos amis et nos voisins.»

AFP

Un policier posté au bout d'une ruelle donnant sur l'avenue Danforth.