Des groupes opposés aux sommets du G7 estiment que la «zone de libre expression» prévue pour les manifestations à La Malbaie est profondément antidémocratique.

Cet «enclos», ce «lieu complètement désolé» contraste avec le discours de Justin Trudeau, qui est l'hôte du sommet de cette année, a dénoncé en conférence de presse Charles Vaillancourt, président d'ATTAC-Québec.

«Dans l'ordre du jour amené par la présidence canadienne, il y a cette idée d'un monde pacifié... venir ici, c'est une expérience qui est un peu intimidante», a-t-il regretté.

«Il faut traverser des barrages policiers, il faut répondre à toutes sortes de questions, alors si c'est ça, le monde pacifié de Justin Trudeau où il y a un contrôle policier, eh bien ce n'est peut-être pas le monde idéal», a exposé M. Vaillancourt.

La zone réservée aux manifestations est délimitée d'un côté par une clôture montée sur les murets de béton que Montréal avait achetés pour la Formule E, et de l'autre, du fleuve Saint-Laurent.

La clôture longue de 1,4 kilomètre ceinture la «zone verte», dont l'accès est restreint et réservé aux citoyens qui habitent le secteur.

Le secteur réservé aux manifestations citoyennes est éloigné de l'endroit où se rencontreront les dirigeants des sept grandes puissances, a déploré le Conseil des Canadiens.

«On est assez loin du manoir Richelieu. C'est la zone de libre expression ici, mais on est un peu en train de prêcher dans le désert, parce que selon moi, les leaders du G7 ne viendront pas vraiment ici», a noté Sujata Dey, porte-parole de l'organisation.

Elle juge que la distance nuit à la mobilisation citoyenne et décourage les manifestants à se pointer là où se tient le sommet - cela ne signifie pas que la flamme de la mouvance altermondialiste s'est éteinte avec les années.

Il reste qu'à La Malbaie, à peine une poignée de gens se trouvaient dans la zone pour exercer leur liberté d'expression, jeudi.

Parmi les curieux venus prendre des photos et les journalistes attirés par la conférence de presse, il y avait tout de même Giannina-Mercier Gouin, une citoyenne qui a elle aussi pesté contre «l'enclos» et les mesures de sécurité déployées dans sa ville.

«C'est tannant. De la rue à ici, on m'a demandé cinq fois où j'allais. Je veux dire, c'est-tu nécessaire qu'il y en ait cinq qui me posent la question? Je pense qu'à un moment donné, quand il y en a eu deux, c'est assez», a-t-elle lancé.

La Malbéenne, qui travaille comme femme de ménage, se dit lésée par la tenue de ce sommet.

Elle dit être allée au boulot un seul jour cette semaine «parce qu'ils (les clients) ne veulent pas qu'on rentre» dans les chambres de l'établissement où elle travaille qui ont été louées pour le G7.

«Peut-être que pour certaines personnes, il y a des retombées économiques, mais pour bien des travailleurs, il n'y en a pas; c'est plutôt une perte de salaire qu'on a», se désole-t-elle, disant ne pas savoir si elle pourra toucher un dédommagement financier.

À la Sûreté du Québec, la porte-parole Joyce Kemp plaide que l'emplacement est limitrophe à la «zone verte», et qu'on ne pouvait pas, pour des raisons de sécurité, prévoir un espace dans cette zone.

«On n'a pas besoin d'accréditation pour y accéder», a-t-elle souligné en entrevue, jeudi, mentionnant au passage que «les gens peuvent aussi s'exprimer ailleurs», tant que cela se fait de manière pacifique.

Centre de détention temporaire

On s'attend à ce que l'épicentre des manifestations soit du côté de Québec. Du côté de La Malbaie, aucun rassemblement d'envergure n'est prévu.

Mais s'il devait y avoir manifestations et débordements dans la ville charlevoisienne ou ses environs, un centre de traitement des contrevenants a été aménagé à Clermont, non loin de La Malbaie.

La SQ a refusé une demande de visite de l'établissement, jeudi, citant des raisons «opérationnelles».

En entrevue téléphonique, la porte-parole Audrey-Anne Bilodeau a expliqué que ce centre avait été mis sur pied afin de «traiter plusieurs arrestations simultanées rapidement, dans le respect des lois et des personnes».

Elle n'a pas voulu préciser quelle était la capacité d'accueil de l'établissement, qui regroupe un poste de police, un palais de justice et un centre de transition de détenus.

«On y retrouve entre autres une zone de décontamination - par exemple des douches, des douches oculaires -, des salles de bains», des salles de comparution ainsi que des «cellules de transition», a spécifié Mme Bilodeau.

Le centre n'est pas conçu pour héberger ses pensionnaires à long terme, a-t-elle indiqué. «Les prévenus détenus seront rapidement transportés à un centre de détention, au besoin.»

«Dernier G7»

Les représentants des deux organisations avaient aussi fait le déplacement à La Malbaie pour réclamer la fin de ces rencontres multilatérales, qui se caractérisent par leur «hypocrisie».

Une banderole sur laquelle on pouvait lire «Dernier G7» a d'ailleurs été accrochée sur le grillage surmontant les murets bétonnés montréalais.

Le sommet du G7 s'ouvrira officiellement vendredi.