Le père d'un policier québécois abattu en service dénonce vigoureusement le projet de loi du gouvernement Trudeau sur les armes à feu, qui selon lui n'aurait pas pu éviter la mort de son fils.

Le fils de Michel LeRoux, Thierry, a été abattu en février 2016 dans la communauté autochtone de Lac-Simon, près de Val d'Or. Le tireur s'était ensuite enlevé la vie en Abitibi.

Dans une lettre adressée au ministre de la Sécurité publique, M. LeRoux plaide que les lois actuelles sont remplies de failles puisqu'elles ont permis au meurtrier de son fils d'accéder à des armes à feu malgré ses antécédents de violence et de troubles psychologiques.

Actuellement, les informations personnelles servent à déterminer si une personne peut obtenir un permis de port d'armes. De plus, la « vérification continue de l'admissibilité » permet au contrôleur des armes à feu de réviser le permis et de faire une enquête si la personne commet un acte criminel.

Selon les statistiques fédérales, 2223 permis d'armes à feu ont été révoqués en 2016. Dans 424 de ces cas, cette révocation était liée à des inquiétudes sur la santé mentale d'un individu.

Le projet de loi présenté le mois dernier élargirait l'étendue des vérifications d'antécédents pour toute personne qui voudrait acheter une arme à feu. En outre, l'ensemble des antécédents d'un potentiel acheteur seraient révisés, plutôt que ceux des cinq dernières années seulement.

Selon le gouvernement, ces nouvelles mesures permettront d'éloigner les armes à feu des mauvaises mains.

Michel LeRoux, qui a rencontré M. Goodale en novembre, écrit dans sa lettre qu'aucune de ces mesures n'aurait permis de prévenir le décès de son fils de 26 ans, puisque les autorités avaient permis au tireur d'obtenir une arme même si elles savaient qu'il avait des antécédents de troubles mentaux.

« Je ne peux qu'exprimer ma déception et ma colère face au projet de loi C-71 que vous venez de déposer. En effet, il n'y a RIEN dans cette législation qui aurait changé quoi que ce soit en lien avec la mort violente et évitable de mon fils Thierry », a-t-il soutenu.

« Je me suis rendu à Ottawa pour vous demander en personne de resserrer les critères dans la loi de manière à ce que les policiers et les tribunaux favorisent systématiquement la sécurité publique plutôt que la possession d'armes, surtout lorsqu'il est question de risques évidents. »

Ralph Goodale affirme être profondément désolé du décès de Thierry Leroux et il a dit vouloir bien lire la lettre de son père avant de réagir, a déclaré son porte-parole, Scott Bardsley.

Le ministre voudrait également s'entretenir avec ses homologues provinciaux quant à la possibilité d'exiger que les professionnels de la santé avisent les autorités quant aux personnes avec des problèmes de santé mentale qui représentent un danger pour les autres.

M. LeRoux écrit que la police avait eu beaucoup d'interactions avec le meurtrier de son fils, qui s'était même fait confisquer ses armes à un moment.

« C'est donc Thierry lui-même qui a dû redonner les armes à cet individu sur l'ordre de ses supérieurs, incluant celle qui a servi à le tuer. »

M. Leroux plaide qu'il reste encore du temps pour amener des « modifications importantes » à la loi pour qu'elle protège le public.

« Ainsi, d'ici son adoption, j'espère pouvoir réviser mes propos et applaudir un gouvernement qui cherche à protéger le public, plutôt que d'en dénoncer un qui se met à genoux devant le lobby proarmes, comme son prédécesseur. »

Le projet de loi est qualifié de trop faible par les partisans du contrôle des armes à feu, alors que certains propriétaires ont jugé qu'il s'agit d'une tentative de ressusciter le critiqué registre des armes à feu.

Selon le projet de loi, les vendeurs d'armes devront garder les registres de leur inventaire et de leurs ventes pendant au moins 20 ans afin d'aider la police dans ses enquêtes.

Les nouvelles mesures obligeraient aussi les acheteurs de fusils de chasse à présenter un permis, qui devra être vérifié par le vendeur.

PHOTO Jacques Boissinot, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Michel LeRoux lors des obsèques de son fils en février 2016.