L'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a commencé ce matin une semaine d'audiences à Montréal.

Il s'agit du deuxième passage de la commission d'enquête itinérante au Québec après Uashat-Maliotenam, près de Sept-Îles, cet été.

En lever de rideau, la commissaire Michele Audet a souligné que 740 familles ont raconté leur histoire au cours des neuf derniers mois. Quelque 600 autres familles ont manifesté leur désir de s'exprimer, d'où la demande de prolongation du mandat de deux ans faite la semaine dernière au gouvernement.

C'est une femme mohawk, Cheryl McDonald, qui a été la première à témoigner aujourd'hui.

Elle a raconté la disparition de sa soeur Carleen en septembre 1988. Le corps de la jeune mère de trois enfants a été découvert dans la forêt par hasard par un chasseur sept semaines plus tard. Elle s'était suicidée. 

« Elle est partie au milieu de la nuit. Je me demande encore pourquoi elle nous a quittés. Pourquoi elle a quitté ses enfants ? Pourquoi elle a quitté nos parents? »

La jeune maman venait de rompre avec le père de ses enfants. Elle vivait une peine d'amour.

Dans un témoignage empreint d'émotion, Cheryl McDonald a parlé du milieu entaché de violence dans lequel elle a grandi. Elle a parlé des abus que sa soeur a vécus aux mains de son conjoint.

« Ce n'est que dans les semaines avant sa mort qu'elle a vraiment commencé à en parler, a confié sa soeur. Elle a même avoué qu'elle avait été hospitalisée parce qu'il l'avait battue. (...) Il la contrôlait physiquement et émotionnellement. »

À un moment, la situation était devenue assez grave pour que les grands-parents prennent les enfants chez eux.

Mme McDonald a aussi raconté les pénibles semaines de la disparition de Carleen.

« Je sais que des familles attendent de retrouver leur proche depuis des dizaines d'années. Mais durant ces sept semaines, nous ne pouvions plus fonctionner. Mes soeurs perdaient leur emploi parce qu'elles manquaient trop. »

« Ma soeur s'est suicidée. Je suis la seule qui le dit comme ça. Au début, je passais dans ma tête de meurtre à suicide et encore à meurtre. »

Cheryl a admis avoir toujours soupçonné que son beau-frère savait que sa soeur allait s'enlever la vie et où elle se trouvait et qu'il n'a rien dit. Il est le dernier à qui Carleen aurait parlé le soir de sa mort.

Plusieurs jours après la découverte du corps, la famille s'est rendue sur les lieux du drame pour découvrir avec effroi que la police de la communauté d'Akwasasne, en charge de l'enquête, avait abandonné sur place la couverture sur laquelle avait été couchée la victime ainsi que sa chevelure entière, qui s'était détachée du squelette.

« Je sais que la police ne reçoit pas beaucoup de financement, mais ils auraient pu demander de l'aide à un autre corps de police ! »

Mme McDonald a raconté comment sa famille a passé des années à ne pas visiter la tombe de la défunte tellement cela faisait mal.

Les audiences publiques se poursuivent jusqu'à vendredi à l'hôtel Bonaventure.