Le tout nouveau chef de l'opposition officielle en Ontario, Doug Ford, a promis de remettre sur pieds le Parti progressiste-conservateur (PPC) qui traverse de grandes difficultés après le départ tumultueux de son prédécesseur et la course au leadership polarisante qui vient de prendre fin. Toutefois, le nouveau patron fait déjà face à de la résistance à l'intérieur même du parti, en commençant par sa plus proche rivale, l'ex-députée Christine Elliott, qui refuse de lui concéder la victoire.

Doug Ford s'est entretenu avec Christine Elliott, dimanche. Une porte-parole a confirmé que Christine Elliott participait à une rencontre avec Doug Ford, ne pouvant toutefois pas indiquer de quoi il était question.

Doug Ford, ex-conseiller municipal de la Ville de Toronto et frère de l'ex-maire controversé Rob Ford, a été nommé chef du PPC tard samedi soir lorsque l'exécutif du parti a annoncé qu'il avait devancé par une faible avance l'ex-députée Christine Elliott.

Christine Elliott a affirmé qu'elle avait remporté le vote populaire, et que des milliers de membres du parti avaient été assignés à la mauvaise circonscription durant le processus du vote.

«Je vais me tenir debout pour ces membres et je prévois enquêter sur l'ampleur de l'anomalie», a-t-elle affirmé par communiqué quelques heures après la déclaration de victoire de Doug Ford.

Néanmoins, le parti a confirmé la victoire de Doug Ford, soulignant qu'un enjeu sur la répartition de certains votes avait été examiné et résolu.

Doug Ford a écarté du revers de la main les allégations de Christine Elliott, dimanche, disant qu'il travaillait à rétablir l'unité au sein du parti afin de renverser le gouvernement libéral de la première ministre Kathleen Wynne à l'occasion des élections en juin.

«Je me préoccupe de Kathleen Wynne, et non de Christine (Elliott) en ce moment», a dit Doug Ford à des journalistes en marge d'un défilé de la Saint-Patrick à Toronto.

«Nous allons vaincre Kathleen Wynne et ramener la prospérité dans cette grande province... Nous unifions l'équipe et nous allons l'emporter contre Kathleen Wynne», a-t-il ajouté.

Lors d'un bref discours de la victoire, samedi soir, Doug Ford a reconnu que la course avait laissé des traces chez certains membres du parti, mais il s'est engagé à regagner leur confiance et à rétablir l'unité à temps pour l'élection générale du printemps.

Doug Ford a déclaré qu'il allait remettre le parti sur la bonne voie et que la plateforme électorale allait rejoindre tous les Ontariens.

Selon le professeur de sciences politiques à l'Université Ryerson de Toronto, Myer Siemiatycki, le mandat d'unifier le parti représente une tâche considérable pour Doug Ford. Surtout si l'on tient compte de l'approche de confrontation qu'il a déployée durant sa brève carrière en politique municipale ainsi que lors de la course au leadership, précise-t-il.

Le couronnement controversé de Doug Ford vient aussi conclure une journée chaotique d'accrocs et de mauvaise communication qui a provoqué d'intenses tensions à l'intérieur du parti, selon M. Siemiatycki.

«Cela laisse certainement des vestiges d'une profonde division et on n'est pas exactement porté à voir la marque politique Ford comme une bâtisseuse de ponts qui tend la main à ceux qui sont en désaccord afin de trouver des compromis et un terrain d'entente», commente le professeur Myer Siemiatycki.

«Son modèle de leadership est très mâle alpha et il reste encore à voir comment les choses vont évoluer», ajoute-t-il en soulignant qu'il n'y a aucune raison de s'attendre à autre chose maintenant que Doug Ford a pris les commandes.

Tout au long de la campagne, Doug Ford a répété à de nombreuses reprises son intention d'arracher le contrôle du parti des mains des élites pour le redonner aux membres à la base du parti.

Il aussi vanté son expérience de gestion de l'entreprise familiale, affirmant que cela l'a préparé à gérer un gouvernement efficace.

Doug Ford a aussi promis d'éliminer la proposition de taxe du carbone, un élément majeur de la plateforme électorale adoptée sous Patrick Brown en novembre. Il a, par ailleurs, critiqué la décision du gouvernement libéral d'ajouter l'éducation sexuelle au programme scolaire et a promis de permettre aux députés de son caucus de voter librement sur les enjeux politiques.

D'après Myer Siemiatycki, le message populiste de Doug Ford va sans doute lui valoir des appuis, mais l'argument que gérer une entreprise familiale prépare à entrer en politique provinciale est bien mince.

«Si vous entrez au gouvernement en pensant que vous gérez une entreprise familiale, cela peut être vraiment problématique», notamment parce que l'État ne peut pas facturer ses services, fait remarquer le politologue.

Le gouvernement libéral et les néo-démocrates de l'Ontario ont dépeint Doug Ford comme un recul pour les conservateurs, accusant le nouveau chef de chercher les faveurs des membres les plus socialement conservateurs.

«Les conservateurs de l'Ontario ont choisi les intérêts corporatistes avant ceux des travailleurs, l'extrémisme religieux avant le droit des femmes et la réduction des dépenses en santé et en éducation», ont commenté les libéraux après la nomination de Doug Ford.