À la veille du début d'une réunion du Conseil de la fédération, les leaders des Premières Nations et les premiers ministres provinciaux ont affirmé, mercredi, qu'il n'y avait pas lieu d'attendre une enquête sur les femmes autochtones disparues et assassinées pour se mettre au travail pour combattre les racines des problèmes.

«Les gouvernements n'ont pas à attendre l'issue de l'enquête», a fait valoir le chef national de l'Assemblée des Premières Nations, Perry Bellegarde, à la suite d'une rencontre avec les dirigeants des provinces et des territoires au Yukon.

«Les gouvernements peuvent investir pour mettre fin aux violences dans nos populations, à l'endroit des femmes et des filles autochtones, et pour s'attaquer au logement, à l'éducation, à la formation, aux services de garde, aux refuges et centres de désintoxication et aux centres de bien-être», a-t-il poursuivi.

Le premier ministre du Yukon, Darrell Pasloski, a convenu que des améliorations pouvaient être apportées dès maintenant.

«Le gouvernement fédéral, les provinces, les territoires, et les leaders et les gouvernements autochtones doivent continuer d'agir, et ne pas attendre les résultats de l'enquête avant de commencer à aller de l'avant. Cela a été reconnu par tout le monde dans la salle», a dit M. Pasloski.

Les premiers ministres provinciaux et territoriaux ont également reconnu qu'il existait un fort appui pour lancer une enquête sur les femmes autochtones assassinées ou disparues.

Le premier ministre québécois Philippe Couillard a déclaré, mercredi, qu'il avait pris l'engagement envers les Premières Nations du Québec de se pencher sur le mandat d'une éventuelle commission d'enquête pour s'assurer que les allégations de sévices sexuels par des policiers contre des femmes autochtones y figurent.

M. Couillard a évoqué les événements de Val-d'Or, où des femmes autochtones ont dénoncé de présumées inconduites commises par des policiers de la Sûreté du Québec. Ces allégations font l'objet d'une enquête confiée au Service de police de la Ville de Montréal.

Selon M. Couillard, il vaut mieux former une seule commission plutôt que de se retrouver avec plusieurs enquêtes parallèles portant sur les mêmes enjeux. Il souhaite toutefois que le tout se fasse dans le respect des responsabilités, des juridictions, de la Constitution et même de la Charte de la langue française.

De son côté, sa collègue de l'Alberta, Rachel Notley, a déclaré que même si les provinces pouvaient avoir des préoccupations différentes, il existe un grand consensus entre elles sur la nécessité d'aller de l'avant dans ce dossier.

Le gouvernement fédéral doit annoncer prochainement les modalités de cette commission d'enquête.

Le premier ministre du Yukon accueille à compter de mercredi ses 12 homologues des provinces et territoires, de même que les dirigeants des cinq organismes autochtones nationaux, pour une réunion de trois jours du Conseil de la fédération, à Whitehorse.

La journée de mercredi a été principalement consacrée aux Premières Nations, qui sont invitées à la grande table du Conseil de la fédération. Les premiers ministres se retrouveront entre eux jeudi et vendredi pour discuter notamment de financement des soins de santé, de changements climatiques et d'énergie, ainsi que de la réforme du Régime de pensions du Canada. Une conférence de presse de clôture est prévue vendredi après-midi.

L'approbation des projets d'oléoducs

Les premiers ministres et les leaders autochtones ont aussi discuté de la manière d'exploiter les ressources naturelles et de développer les infrastructures reliées à cette production, dont les pipelines, avec le consentement et la participation des Premières Nations.

«Aux gouvernements - fédéral, provinciaux, municipaux, et à l'industrie - le message est simple: avant de construire quoi que ce soit, construisez une relation de respect avec les Premières Nations», a déclaré M. Bellegarde.

Le premier ministre du Yukon a reconnu que les dirigeants n'avaient pas discuté de façon spécifique d'inclure les Premières Nations dans la conception ou l'examen des projets des ressources naturelles. Mais il a tenu à dire que leur assentiment serait crucial pour les chantiers futurs.

«Lorsqu'une entreprise ou une industrie veut investir et travailler dans une région, elle doit impliquer d'emblée les Premières Nations locales. Il sera difficile pour ces projets de réussir à moins d'avoir cette implication», a dit M. Pasloski.

Échanges commerciaux

M. Pasloski croit que ses homologues des provinces et territoires sont déterminés à libéraliser davantage les échanges commerciaux à l'intérieur du pays.

La libre circulation des biens entre les provinces figure - avec la santé - en bonne place de l'ordre du jour de la rencontre semestrielle des chefs de gouvernement. Le premier ministre Pasloski, qui préside cette année le Conseil de la fédération, estimait mardi qu'il ne devrait pas y avoir plus de barrières au commerce interprovincial qu'aux exportations vers des pays qui ont conclu un accord de libre-échange avec le Canada.

La première ministre de la Colombie-Britannique Christy Clark a illustré la chose en déplorant que le vin de sa province soit introuvable en Ontario alors qu'il est vendu un peu partout dans le monde.

Un nouvel accord impliquant les gouvernements fédéral et provinciaux est en préparation à l'échelle ministérielle et les premiers ministres devraient en consulter une ébauche cette semaine.

Déjà, il y a trois ans, la Colombie-Britannique, l'Alberta et la Saskatchewan ont créé une zone de libre-échange pour améliorer la fluidité de la main-d'oeuvre et réduire la bureaucratie entre elles. Des initiatives du genre ont aussi été prises dans les Maritimes.

Le premier ministre fédéral ne participe pas à ces réunions du Conseil de la fédération, un organisme créé en 2003 sous l'impulsion du premier ministre québécois Jean Charest.