L'histoire de William Gadoury, un adolescent de 15 ans de Saint-Jean-de-Matha qui pourrait avoir découvert une cité maya grâce à des recherches sur les constellations et les images satellites, a fait le tour du monde cette semaine. Des experts - incluant ceux qui ont travaillé avec le jeune scientifique - appellent à la prudence, tandis que d'autres disent que la nouvelle est « fausse ».

Visibles sur les images satellites, des lignes mystérieuses dans l'épais couvert de verdure de la péninsule du Yucatán laissent croire que des constructions humaines seraient enfouies sous la jungle.

Est-ce le cas ? « Je dirais que les chances sont à 50 %, laisse tomber le Dr Armand LaRocque, spécialiste en télédétection de l'Université du Nouveau-Brunswick à Frédéricton. Peut-être que oui, peut-être que non. La seule façon de le savoir, c'est d'aller sur place. »

Depuis quelques jours, les médias du globe s'arrachent l'histoire de William Gadoury, 15 ans, ce jeune Québécois qui affirme avoir découvert une cité maya perdue en superposant des images des constellations de l'époque des mayas à celles de cartes de villes mayas connues.

« Je ne comprenais pas pourquoi les Mayas avaient construit leurs cités loin des rivières, sur des terres peu fertiles et dans les montagnes, a confié l'adolescent de Saint-Jean-de-Matha au Journal de Montréal. Il fallait qu'il y ait une autre raison, et comme ils adoraient les étoiles, l'idée m'est venue de vérifier mon hypothèse. »

Depuis plusieurs années, le Dr Armand LaRocque agit comme mentor pour le jeune William Gadoury, qui ne donne plus d'entrevue depuis l'explosion de la demande médiatique. Au cours des derniers jours, le Dr LaRocque a répondu aux questions de journalistes d'Espagne, du Portugal, d'Australie et des Pays-Bas, notamment.

Le Dr LaRocque dit qu'il n'est « pas à l'aise » avec la façon dont l'histoire a été rapportée dans les médias. « L'interprétation d'images satellites, ce n'est pas toujours précis. Il faut y aller avec des pincettes. »

« Ses conclusions sont fausses »

Joint par La Presse, Claudio Obregón Clairin, journaliste et professeur spécialiste de la civilisation maya installé à Cancún, au Mexique, dit voir des incohérences dans les hypothèses de William Gadoury.

« Je trouve formidable que ce jeune homme s'intéresse à la civilisation maya, dit-il. Malheureusement, ses conclusions sont fausses. »

Sur la carte qu'il a produite, William Gadoury a utilisé des villes modernes comme San Cristóbal de las Casas ou Villahermosa, note M. Obregón Clairin. « Ça ne permet pas de faire de liens historiques avec les cités mayas. Aussi, il fait des liens entre des villes construites à plus de 2000 ans d'écart. C'est comme si nous et les Romains nous mettions d'accord sur l'emplacement des villes. Ça n'a pas de sens. »

M. Obregón Clairin fait aussi remarquer que le territoire identifié par William Gadoury est bien connu des archéologues. « C'est près de [la cité maya de] Calakmul, que nous connaissons très bien et il n'y a pas de ville maya dans ce morceau de territoire, où la jungle est d'ailleurs de moins en moins présente », dit-il.

Un bel effort

Qu'un adolescent de 15 ans s'intéresse aux Mayas mérite d'être applaudi, ajoute Jason Colavito, auteur expert en histoire ancienne et blogueur, en entrevue avec La Presse depuis sa résidence dans l'État de New York.

M. Colavito soulève de nombreuses questions quant aux méthodes employées par le jeune scientifique, et la façon dont ces résultats ont été rapportés dans les médias.

« Il a analysé les 22 cartes des constellations des livres mayas [Codex de Madrid], mais en a ajouté une 23e pour faire sa découverte, et on ne sait pas pourquoi. Aussi, le recueil des constellations utilisées par William date de la fin de l'époque maya. Or les constellations changent au fil des années et des siècles, et il est loin d'être clair que les premiers Mayas voyaient la même chose dans le ciel. »

M. Colavito rappelle que les Mayas ne formaient pas une civilisation unie et coordonnée.

Ivan Šprajc, chercheur à l'Institut d'études anthropologiques et spatiales de Slovénie, a expliqué sur sa page Facebook que le « rectangle » visible sur la photo satellite était probablement un « vieux champ, abandonné il y a plusieurs années, mais pas il y a plusieurs siècles ».

Quant à la localisation géographique des cités mayas, il note que certaines étaient situées loin des cours d'eau, mais que des facteurs environnementaux sont derrière ces choix, comme l'abondance de pluie ou la présence d'une route importante. « Que les étoiles aient été utilisées pour déterminer les emplacements est hautement improbable », écrit-il.