Une menace terroriste « précise » contre Genève a incité jeudi les autorités suisses à renforcer le niveau de sécurité dans la ville, siège européen des Nations unies, alors qu'au moins quatre djihadistes en liberté étaient activement recherchés. La ville de Toronto serait également « particulièrement menacée », tandis qu'Ottawa et Vancouver seraient dans la ligne de mire d'un terroriste, selon des médias suisses.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) dit officiellement prendre « très au sérieux ces menaces », sans confirmer leurs fondements. À l'interne, une source a indiqué à La Presse que tout était mis en oeuvre pour vérifier la nature de cette menace. « Nous faisons les vérifications qui s'imposent de concert avec nos partenaires de la sécurité. C'est difficile parce que la menace n'est pas très spécifique. Mais on ne peut certainement pas l'ignorer », a-t-on indiqué à La Presse.

À Ottawa, le ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, s'est voulu rassurant. Il a indiqué que les autorités canadiennes sont plus aux aguets depuis les attentats terroristes de Paris, à l'instar des responsables de la sécurité d'autres pays. Mais il n'y a pas lieu, pour le moment, de rehausser d'un cran le niveau de sécurité au pays.

« À l'heure actuelle, il n'y a rien de nouveau ou de différent qui pourrait affecter le niveau de sécurité au pays. Il n'y a pas de changement à cet égard, mais nous demeurons vigilants. Il n'y a personne qui tient quoi que ce soit pour acquis. Mais nous n'avons pas d'information en ce moment qui nous pousserait à changer le niveau de sécurité », a déclaré le ministre Goodale.

« Il y a évidemment des reportages dans les médias en Europe. Quand il y a ce genre de spéculation, les agents canadiens font évidemment les vérifications qui s'imposent. Mais jusqu'ici, il n'y a rien qui nous amènerait à changer notre perception de la situation pour ce qui est de l'évaluation du risque pour le Canada », a-t-il ajouté.

Selon le quotidien La Tribune de Genève, qui cite une note de la police genevoise, trois villes seraient « particulièrement menacées actuellement : Genève, Toronto et Chicago ». Aucune source officielle ne confirme toutefois que les métropoles canadiennes et américaines seraient en péril.

Ce même document policier contiendrait aussi les noms des quatre hommes considérés comme des sympathisants du groupe armé État islamique recherchés par la police. Ceux-ci seraient « armés et dangereux », selon le journal suisse Le Matin. Deux autres suspects, dont un ami de Salah Abdeslam, un des auteurs des attentats de Paris, étaient également recherchés des policiers, selon La Tribune de Genève.

Les villes d'Ottawa et de Vancouver ne sont pas nommées dans ce document policier qui proviendrait des services secrets américains. Un cinquième présumé djihadiste lié à l'alerte terroriste de Genève aurait toutefois évoqué d'éventuels attentats contre celles-ci, a rapporté jeudi Le Matin. La police de Vancouver a confirmé à La Presse n'avoir reçu « aucune information concernant des menaces spécifiques contre Vancouver ».

Selon Dave Charland, ex-agent du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), les autorités canadiennes tentent en ce moment de savoir si les six présumés djihadistes ont un lien avec le Canada. « Mais pourquoi nommer trois villes canadiennes, à côté de Genève ? Pourquoi ne pas nommer New York, Washington ou Francfort ? Il doit nécessairement y avoir un lien avec le Canada. Mais quelle est la nature de ce lien-là ? », se questionne-t-il.

De telles menaces à l'encontre de grandes villes occidentales surviennent toutefois fréquemment, nuance Dave Charland. « Ce n'est pas la première fois que quelqu'un fait une vidéo dans laquelle il mentionne le Canada ou une ville au Canada. Je pense qu'on est encore à l'étape d'évaluer si oui ou non il s'agit d'une menace sérieuse envers les villes canadiennes », explique-t-il.

Par ailleurs, le fait que la ville de Toronto soit citée dans une note de police suisse ne donne pas davantage de crédibilité à cette information. Celle-ci est peut-être déjà connue des autorités canadiennes et peut ne pas provenir d'une nouvelle source d'information indépendante. « Il ne faut pas oublier que la majorité des informations qu'ils reçoivent ne sont pas crédibles ou s'avèrent non fondées », nuance l'expert en renseignement.

- Avec la collaboration de Vincent Larouche