Au deuxième jour des grèves tournantes du front commun, le premier ministre Philippe Couillard est demeuré inflexible, mardi, faisant appel au «sens de la responsabilité» des dirigeants syndicaux.

Sans aller jusqu'à dire que sa patience avait des limites, M. Couillard a répété qu'il souhaitait voir les parties trouver un terrain d'entente en négociant.

«Il m'apparaît très surprenant que l'on ne puisse pas régler dans le cadre financier gouvernemental, a-t-il dit, en marge d'une annonce à Montréal. On a réglé dans ce cadre avec les médecins omnipraticiens, avec les municipalités, la Société des traversiers.»

Au même moment, à Québec, des grévistes bloquaient entre autres l'accès au Complexe G, considéré par plusieurs comme le symbole de la fonction publique dans la Vieille-Capitale. Du côté de Montréal, c'était le palais de justice qui était inaccessible.

Le mouvement de débrayage devait également se faire sentir dans Chaudière-Appalaches, le Bas-Saint-Laurent, la Côte-Nord, Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine ainsi que chez des syndiqués de l'Agence du revenu du Québec.

Pour la présidente du Syndicat de la fonction publique du Québec, Lucie Martineau, le gouvernement Couillard se contente de laisser traîner les pourparlers.

«On appelle ça de la négociation de façade, a-t-elle déploré, en point de presse à Québec. Il y a des négociations, mais pas d'avancées.»

Le front commun intersyndical, qui représente quelque 400 000 employés de l'État, réclame des augmentations de 4,5 % par année pendant trois ans.

Selon Mme Martineau, cela permettra aux syndiqués de combler un écart salarial tout en suivant l'inflation au cours des prochaines années.

«Les cinq dernières années, nous nous sommes appauvris et là, ce qu'ils nous offrent, c'est de s'appauvrir pour les cinq prochaines années. C'est inconcevable», a-t-elle dit.

De son côté, le gouvernement offre deux années de gel salarial, suivies d'augmentations d'un pour cent par année pendant trois ans. Il veut aussi faire passer de 60 à 62 ans l'âge auquel il sera possible de prendre sa retraite sans pénalité.

«Il faut regarder ce qui se fait ailleurs dans d'autres provinces, a dit le premier ministre. L'Ontario vient de signer des contrats. Allez voir les paramètres, ce n'est pas loin de ce que nous offrons. C'est la réalité des finances publiques au Canada, et pas uniquement au Québec.»

M. Couillard, qui dit ne pas vouloir négocier sur la place publique, s'est montré ouvert aux discussions, mais a rappelé que l'ajout d'«un dollar dans la convention collective n'était pas garant d'une amélioration des services».

Les grèves tournantes d'une journée, qui ont débuté lundi, doivent toucher toutes les régions du Québec jusqu'à jeudi.

Les syndicats du front commun disent qu'ils n'avaient guère le choix de mettre à exécution leur plan pour accentuer la pression sur le gouvernement Couillard dans le cadre des négociations.

Le premier ministre n'a pas remis en question la légitimité de cette stratégie syndicale, rappelant toutefois l'importance pour la population d'avoir accès aux édifices publics.

«C'est là que la patience des gens risque d'être mise à rude épreuve, a observé M. Couillard. On le voit qu'ils manifestent, mais il ne faut pas empêcher les gens de vaquer à leurs occupations habituelles. Ce n'est pas le gouvernement qui est pénalisé, ce sont les citoyens qui vont chercher ces services.»

Mercredi, l'Estrie, la Montérégie, le Centre-du-Québec ainsi que la Mauricie doivent être le théâtre des grèves tournantes. Jeudi, ce sera au tour des régions de Montréal et Laval, ainsi que des syndiqués de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse.

Après cette semaine, la pression pourrait bien monter d'un cran. Le front commun prévoit deux autres journées de débrayage, tour à tour dans chaque région, à compter du 9 novembre. Finalement, une grève générale de trois jours est au menu les 1er, 2 et 3 décembre.