Depuis 10 ans, 311 personnes ont été interceptées en tentant d'entrer au Canada avec un faux passeport canadien, dont 55 à l'aéroport de Montréal. Ces données, obtenues en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, démontrent surtout une baisse radicale des interceptions, que le syndicat des douaniers attribue à une diminution des effectifs.

Les douaniers canadiens n'interceptent pratiquement plus personne en possession d'un faux passeport orné d'une feuille d'érable.

En 2005, 106 individus s'étaient fait prendre en possession d'un passeport canadien falsifié, trafiqué ou volé en tentant d'entrer au pays. En 10 ans, ce nombre a décru de façon spectaculaire pour atteindre quatre l'an dernier.

Chiffres surprenants

Ces chiffres inédits, que La Presse a obtenus en ayant recours à la Loi sur l'accès à l'information, surprennent le président du Syndicat des douanes et de l'immigration, Jean-Pierre Fortin.

«C'est à peu près impossible qu'il y ait juste quatre personnes qui ont tenté de passer avec des faux passeports», s'est-il exclamé au téléphone.

Selon lui, «tout ce qui est détecté, que ce soit de la contrebande ou des documents frauduleux, ne cesse de diminuer présentement» parce que l'Agence des services frontaliers du Canada a «diminué les employés».

Les nouvelles bornes électroniques qui accueillent maintenant les passagers à leur arrivée à l'aéroport font certes un «certain examen», illustre-t-il, «mais chose certaine, ça ne peut pas tout détecter».

Avec les deux tiers des faux passeports saisis en 10 ans, l'aéroport Pearson de Toronto est le plus concerné par le problème.

Suivent ceux de Montréal et de Vancouver, les deux autres plus grandes portes d'entrée du Canada.

L'Agence des services frontaliers a indiqué dans un courriel à La Presse ne pas pouvoir «émettre d'hypothèses quant à la fluctuation du nombre de saisies de passeports canadiens contrefaits».

Menace terroriste

Les faux passeports sont un outil de prédilection surtout pour les organisations terroristes, selon le président du syndicat des douaniers. «C'est ces gens-là qui cherchent à déjouer le système», affirme-t-il. Les réseaux de passeurs, qui font dans l'immigration clandestine, n'y auraient pas recours, préférant d'autres méthodes pour franchir la frontière.

«Depuis 2002, des améliorations technologiques importantes ont été apportées au livret de passeport canadien», a indiqué dans un courriel à La Presse une porte-parole du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, Sonia Lesage.

Photo numérique, informations personnelles gravées dans le papier, images holographiques, ces améliorations réduisent «considérablement les risques de contrefaçon», assure Mme Lesage, mais «les faussaires et le crime organisé s'ajustent en conséquence», estime Jean-Pierre Fortin.

Un passeport prisé

Le passeport canadien demeure très prisé sur le marché noir, son prix atteignant 3000$US, selon ce qu' a rapporté l'an dernier le quotidien britannique The Guardian dans un article relatant comment la Thaïlande est devenue une plaque tournante mondiale du commerce de faux passeports.

C'est le triple de la valeur des passeports britanniques, italiens, espagnols et d'autres pays européens. Le passeport israélien, également très apprécié des organisations criminelles et terroristes en tous genres, coûte quant à lui entre 1500 et 2000$.

- Avec William Leclerc et Thomas de Lorimier