Le premier ministre Stephen Harper alimente l'islamophobie lorsqu'il affirme que le port du niqab est « enraciné dans une culture qui est misogyne», estime le chef du NPD, Thomas Mulcair.

Les propos que M. Harper tient depuis quelques jours sont d'ailleurs indignes des fonctions qu'il occupe, a ajouté le chef néo-démocrate mercredi matin à l'issue d'une réunion de son caucus.

Alors que le compte électoral à rebours est bien engagé, le ton monte de plus en plus entre les leaders des trois principales formations politiques. Le contexte est aussi particulier : les députés étudient présentement le projet de loi antiterroriste du gouvernement Harper, qui aurait notamment pour effet d'accorder plus de pouvoirs au Service canadien de renseignements et de sécurité (SCRS).            

Durant un échange aux Communes avec le chef libéral Justin Trudeau, qui accusait M. Harper et certains de ses ministres de fomenter une politique de peur et de division à des fins électoralistes, le premier ministre a soutenu que son adversaire libéral défendait mal les intérêts des Canadiens qui s'opposent au port du niqab durant les cérémonies de citoyenneté.

« Il est très facile de comprendre pourquoi nous ne permettons pas aux gens de se couvrir le visage durant les cérémonies de citoyenneté. Pourquoi les Canadiens iraient-ils à l'encontre de leurs propres valeurs et appuieraient-ils une pratique qui n'est ni transparente ni ouverte et qui est, honnêtement, enracinée dans une culture misogyne? C'est inacceptable pour les Canadiens et les Canadiennes », a affirmé M. Harper.

Pour le chef du NPD, le premier ministre va trop loin. « M. Harper évoque spécifiquement des mosquées (durant le débat). Cela alimente l'islamophobie et c'est irresponsable de sa part », a d'abord affirmé M. Mulcair.

« Quand il parle d'une culture de 1,8 milliard d'êtres humains comme étant anti-femme - c'est ce qu'il a décrété hier à la Chambre des communes. Ils tentent maintenant de faire marche arrière, mais il a dit ce qu'il a dit et c'est très divisif et irresponsable. C'est indigne de la part d'un premier ministre du Canada », a-t-il ajouté.            Le port du niqab a été propulsé à l'avant-scène de l'actualité politique au cours des dernières semaines après que la Cour fédérale eut statué le mois dernier qu'Ottawa ne peut interdire le port du niqab lors des cérémonies d'assermentation pour recevoir la citoyenneté canadienne. 

Le juge Keith M. Boswell avait alors estimé qu'Ottawa avait en fait violé ses propres règles sur l'immigration en instaurant, en 2011, un moratoire sur le port du niqab au cours de ces cérémonies.

Quelques jours après cette décision, le premier ministre Stephen Harper a annoncé, alors qu'il se trouvait à Victoriaville, au Québec, que son gouvernement porterait cette décision en appel.

« Franchement, je pense [personnellement] et je pense que la plupart des Canadiens et des Canadiennes trouveraient offensant qu'une personne cache son identité au moment même où elle souhaite se joindre à la famille canadienne», avait affirmé M. Harper.

Le chef libéral Justin Trudeau et le chef du NPD Thomas Mulcair ont annoncé qu'ils sont d'accord avec la décision de la Cour fédérale. Depuis lors, ils sont la cible des attaques des conservateurs de Stephen Harper.

Le Bloc québécois a pour sa part accusé les conservateurs de faire preuve d'hypocrisie dans ce dossier d'autant plus qu'ils n'ont jamais interdit le vote voilé.

« Je ne m'explique pas que, d'un côté, les conservateurs proposent de légiférer pour la cérémonie de citoyenneté à visage découvert et de l'autre - en pleine année électorale - ils refusent aveuglément de le faire pour le vote. Il y a là trop d'ingrédients pour nourrir le cynisme des citoyennes et des citoyens qui y voient de l'opportunisme électoral », a affirmé le chef bloquiste Mario Beaulieu dans un communiqué de presse.