Doug Ford est soulagé que son frère ait finalement décidé d'obtenir de l'aide pour ses problèmes de consommation. Il promet de continuer à l'appuyer, malgré les nombreuses voix qui s'élèvent à Toronto pour réclamer sa démission complète.

« C'est l'une des journées les plus difficiles de ma vie. J'ai aussi un sentiment de soulagement. Comme grand frère, je suis soulagé que Rob a fait face à ses problèmes et décider d'obtenir de l'aide professionnelle », a déclaré Doug Ford lors d'un bref point de presse à l'hôtel de ville de Toronto.

C'est avec émotion que Doug Ford a réitéré son amour pour son frère Rob.

Le maire de la plus grande ville du Canada a annoncé mercredi soir qu'il prenait une pause d'au moins 30 jours pour aller en cure de désintoxication. Il a affirmé avoir un problème avec l'alcool et « les choix » qu'il fait lorsqu'il en consomme. Il n'a pas écarté un retour dans ses fonctions et dans la course à la mairie par la suite.

M. Ford a quitté son domicile tôt jeudi matin, valises à la main. Il n'a pas parlé aux journalistes et n'a pas divulgué sa destination. Un caméraman a écrit sur Twitter que son passeport était sur le tableau de bord. Doug Ford n'a pas répondu aux questions à ce sujet. 

Nouvelle vidéo de crack

M. Ford a fait cette annonce-choc après que deux nouveaux enregistrements aient fait surface dans les médias mercredi soir.

Dans le premier enregistrement, une vidéo qui n'a pas été rendue publique, deux journalistes du Globe and Mail ont rapporté l'avoir vu en train de fumer ce qui semble être du crack. 

La vidéo a été filmée à son insu tôt samedi matin dans le sous-sol de chez sa soeur. Il est en compagnie de cette dernière, qui a déjà admis avoir des problèmes de consommation, et de Sandro Lisi, l'ancien chauffeur du maire qui a été accusé d'extorsion et de trafic de drogue. 

La personne qui a filmé la vidéo a approché le Globe and Mail et le site web Gawker, notamment, pour la vendre. Elle demandait un prix « au moins dans les six chiffres ». 

Le Globe and Mail a admis avoir versé un montant non divulgué pour obtenir des images tirées de la vidéo, mais pas la vidéo elle-même. Le site Gawker a rapporté que le montant pourrait s'élever à 10 000 $.

Le nouvel éditeur en chef du Globe, David Walmsley, a justifié son geste dans les pages du quotidien jeudi matin en expliquant que ce n'est pas une pratique normale pour le journal, mais que l'intérêt public le justifiait dans les circonstances. 

Enregistrement de lundi 

Le deuxième enregistrement remonte à lundi soir et a été obtenu par le Toronto Sun et le Toronto Star. C'est un enregistrement audio dans lequel le maire, profondément intoxiqué dans un bar d'Etobicoke près de son domicile, jure et déparle au sujet de la politique municipale et provinciale.

On peut l'entendre critiquer la décision du chef du Parti progressiste-conservateur ontarien, Tim Hudak, de voter en faveur de hisser le drapeau gai devant l'hôtel de ville.

« Hudak arrive et dit : ''Ouais, je suis d'accord avec tous les gays'' », a lancé M. Ford.

« Juste là, il a perdu mon vote », a ajouté le politicien conservateur.

Il a aussi fait des commentaires à connotation sexuelle à l'égard d'une conseillère municipale et adversaire dans la course à la mairie : « Et Karen Stintz », lui demande un interlocuteur alors qu'il discute de la campagne. 

« Je voudrais la baiser », a-t-il dit.

Démission réclamée

De nombreux conseillers ont réclamé la démission totale et immédiate du maire Ford. « Nous avons vu ce scénario auparavant. Nous lui avons demandé de démissionner. Ça ne dérange pas combien de fois on lui demande. C'est au maire de décider s'il va mettre de côté son désir égoïste de s'accrocher au pouvoir et de tenir la ville en otage », a déclaré la conseillère Janet Davis. 

« Je suis profondément déçu par ces révélations du comportement du maire Ford. Pour le bien de la ville, je demande au maire Ford de démissionner », a renchéri l'un de ses adversaires dans la course à la mairie, John Tory. 

D'autres ont refusé d'aller aussi loin, dont Karen Stintz : « En point de presse à l'hôtel de ville jeudi, elle a raconté comment elle avait dû expliquer à ses enfants en les reconduisant à l'école que le maire avait dit de « gros mots » à son égard.

Mais elle a refusé de réclamer sa démission : « Les seules personnes qui peuvent démettre Rob Ford de ses fonctions sont les gens de Toronto », a-t-elle déclaré. 

Olivia Chow, une autre candidate à la maire et conjointe du défunt chef du NPD Jack Layton, a fait écho à ses propos. « Je suis certaine que tout le monde dans la ville lui souhaite en tant que personne de guérir de sa maladie », a-t-elle déclaré. 

« La chose appropriée maintenant est de choisir un nouveau maire le 27 octobre », a-t-elle ajouté.

Le conseiller Giorgio Mammoliti a même défendu le premier magistrat avec énergie. « La ville va continuer à être gérée. Nous avons un maire adjoint qui est déjà en contrôle. Arrêtez de faire de la politique et soyez des êtres humains pour une fois, plutôt que d'essayer de le pousser dans sa tombe », a-t-il lancé. 

Il a prédit que le politicien reviendrait en force après son traitement, qu'il serait méconnaissable et qu'il confondrait les sceptiques.

Déclaration du maire Ford

Rob Ford a diffusé une déclaration tard en soirée mercredi : « Il n'est pas facile d'être vulnérable, et c'est l'un des moments les plus difficiles de ma vie », a-t-il écrit.

« J'ai un problème avec l'alcool et les choix que j'ai faits alors que j'étais sous influence. Je me bats contre cela depuis un certain temps », a-t-il ajouté.   

« Aujourd'hui, après avoir pris du temps pour réfléchir sur mon bien-être, comment mieux servir les gens de Toronto et ce qui est dans le meilleur intérêt de ma famille, j'ai décidé de prendre congé de ma campagne et de mes responsabilités de maire et d'aller chercher de l'aide immédiate. » 

Il a signé sa lettre « Maire Rob Ford ». 

Dans une entrevue au Toronto Sun, la seule qu'il a accordée hier, il a reconnu qu'il pourrait même mourir s'il continuait son train de vie actuel.

L'avocat de M. Ford, Dennis Morris, a indiqué que son client ne se retirait pas de la campagne en cours. Les élections municipales sont prévues pour l'automne.

« Il fait ce que je pense que la majorité de la population croyait être approprié il y a plusieurs mois », a-t-il dit au Toronto Star.

L'avocat a remis en doute l'authenticité de la vidéo et Rob Ford. Ni lui, ni Rob Ford ont confirmé la nature de la substance qui se trouvait dans la pipe. 

Deuxième vidéo de crack 

C'est la deuxième fois qu'une vidéo où le maire Ford fume ce qui semble être du crack refait surface.

La première avait déclenché une controverse monstre en mai. Après l'avoir nié pendant plusieurs mois, le maire avait finalement admis qu'il avait déjà consommé cette substance hautement addictive, dans l'une de ses « stupeurs éthyliques ».

Le conseil municipal lui a retiré plusieurs de ses pouvoirs dans la foulée de cette première controverse. M. Ford a toujours refusé de démissionner et affirmé qu'il n'avait aucun problème de consommation, malgré les nombreux autres incidents relayés par les médias au cours de la dernière année. 

La Presse n'a pas vu cette deuxième vidéo. Le Globe and Mail a rapporté qu'on peut y voir le magistrat de la plus grande ville du Canada aspirer profondément de la fumée à partir d'une longue pipe couleur de cuivre, tandis que son bras est saisi de convulsions.

La personne qui est en sa possession aurait allégué qu'il fait partie d'une série de trois segments filmés à environ 1h15 samedi matin.

La personne en possession de la première vidéo il y a un an avait aussi essayé de la vendre pour une somme importante. C'est le Toronto Star et le site web Gawker qui en avaient finalement révélé l'existence. 

Le Toronto Star a rapporté jeudi que le récent dérapage de M. Ford remontait à la fête de la Saint-Patrick, et qu'il a été vu faisant la fête dans plusieurs établissements de la ville. 

Il aurait même eu une prise de bec avec Justin Bieber dans un bar branché de Toronto. Le maire l'aurait approché pour le saluer et le jeune chanteur lui aurait demandé s'il avait apporté du crack avec lui. La blague aurait mis M. Ford hors de lui.