Le premier ministre Stephen Harper s'est fait rassurant, mercredi, après que le Commissariat à la vie privée eut révélé que des firmes de télécommunications ont partagé les renseignements personnels de 800 000 Canadiens avec des organismes gouvernementaux.

Selon des données obtenues par la commissaire par intérim, Chantal Bernier, des agences gouvernementales ont demandé aux compagnies de leur fournir des renseignements sur des clients près de 1,2 million de fois par année. Les entreprises ont accédé à ces demandes à près de 800 000 reprises.

Les Canadiens dont les renseignements sont partagés par leur fournisseur de services de téléphone ou d'internet n'en sont pas avisés.

Les chiffres de la commissaire sont partiels puisqu'ils ne touchent que neuf fournisseurs de services de télécommunications sur 30.

« Ces chiffres sont, en fait, peu révélateurs, a souligné Mme Bernier en entrevue. C'est une agrégation sans détail. On ne sait pas combien de divulgations ont été faites sans mandat ou avec mandat. On ne sait pas quel genre d'information est transmise. »

Elle dit avoir eu beaucoup de difficulté à obtenir la coopération des compagnies.

Pressé de questions aux Communes, le premier ministre a tenté de calmer le jeu.

« Différents organismes policiers ou d'enquête canadiens vont, de temps à autres, demander de l'information à des compagnies de télécommunications, a déclaré M. Harper. Ils le font toujours en respectant la loi. Ils cherchent toujours un mandat lorsque c'est requis. Bien sûr, nous nous attendons à ce que les compagnies de télécommunications respectent aussi la loi. »

«Invasion» de la vie privée, dit Mulcair

N'empêche, les données de la commissaire sont « abominables », « inexplicables » aux yeux du chef du Nouveau Parti démocratique, Thomas Mulcair. Il accuse le gouvernement conservateur d'être responsable de cette « invasion » de la vie privée des Canadiens.

« On est à une époque où toute pudeur est en train d'être perdue, a-t-il dénoncé. L'idée même que les gens ont droit à une vie privée est en train de s'étioler. Il faut que le gouvernement commence à donner des réponses. »

Le chef du Parti libéral, Justin Trudeau, note pour sa part que plusieurs éléments restent flous dans les données. Il veut savoir quelles organismes gouvernementaux ont demandé les renseignements et pourquoi ? Encore là, c'est au gouvernement Harper de donner l'heure juste, dit-il.

« Le gouvernement doit nous fournir des réponses, a-t-il dit. S'il ne nous donne pas des réponses extrêmement claires, il faut une enquête. »