Les coûts d'exploitation et de maintenance de l'éventuel programme de chasseurs furtifs F-35 pourraient être considérablement plus élevés que ce qui est maintenant admis par le gouvernement Harper, concluent deux organismes.

Le Centre canadien de politiques alternatives et l'Institut Rideau évaluent que les coûts projetés actuellement pour les F-35 pourraient être sous-estimés de 12 à 81 milliards $, dépendant d'une série de facteurs et des risques sur 40 ans.

Une analyse indépendante du programme, menée par le secrétariat des Travaux publics, qui supervise les projets de remplacement des CF-18, a établi les coûts totaux à vie d'un programme de 65 chasseurs furtifs à un peu plus de 44 milliards $ sur quatre décennies.

Michael Byers, professeur de sciences politiques à l'Université de la Colombie-Britannique et auteur du rapport des deux groupes de réflexion, met en doute les calculs du secrétariat des Travaux publics, qui se basent sur les coûts de maintenance à long terme de la flotte actuelle des CF-18 plutôt que sur les F-35.

Selon l'expert en matière de défense, bien que le programme des F-35 soit encore en développement, il a été déjà démontré que ses coûts d'exploitation et de maintenance seraient environ 1,5 fois plus importants que ceux des CF-18.

Le gouvernement Harper s'apprête à décider s'il ira de l'avant avec le programme controversé des F-35 pour le remplacement des CF-18, ou s'il lancera un appel d'offres. Une évaluation de la Défense nationale sur les coûts à long terme des F-35 figurera parmi un certain nombre de rapports sur lesquels le cabinet devrait se pencher.

M. Byers a souligné que son évaluation, qui estime que les coûts totaux pourraient atteindre 126 milliards $, se base sur des données du U.S. Government Accountability Office à Washington, le service d'enquête du Congrès américain, qui a surveillé de près le développement du programme.

Il a aussi soutenu que d'autres coûts structurels, comme les modifications à la flotte d'appareils de ravitaillement en vol, ne sont pas pris en compte dans les projections des Travaux publics.

L'étude réalisée par M. Byers examine également certains risques tels que les prix volatils du carburant, l'inflation et la fluctuation des taux de change.

Le cabinet de la ministre des Travaux publics, Diane Finley, s'est empressé, mardi, de minimiser la portée du nouveau rapport. «De véritables experts indépendants, qui ont eu accès à toutes les données, s'assurent actuellement que les rapports préparés par la Défense nationale sont rigoureux et impartiaux», a indiqué par courriel la porte-parole, Alyson Queen.

Les évaluations du gouvernement ont été validées par des hauts fonctionnaires et des experts, comme l'ancien vérificateur général Denis Desautels et l'économiste Ken Norrie, a-t-elle ajouté. «Le mécanisme d'évaluation des différents scénarios est supervisé par un comité indépendant, composé de personnes qui ont de solides connaissances techniques et financières, et qui connaissent très bien le fonctionnement de l'approvisionnement militaire canadien.»

Un dirigeant du manufacturier américain des F-35 s'est fait encore plus cinglant, qualifiant le rapport «d'inexact et de faux».

Steven O'Bryan, vice-président au développement des affaires pour le F-35 chez Lockheed Martin, a soutenu que certaines données citées dans le rapport canadien sont repiquées de rapports rédigés pour le Congrès américain en 2011, et que ces informations sont désuètes. Selon lui, les experts canadiens ont délibérément tenté de gonfler les coûts du programme.