Le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU) s'inquiète pour de nombreux ménages à faible revenu qui habitent dans des logements sociaux, qui risquent d'être confrontés à d'importantes hausses de loyer au cours des prochaines années lorsque l'hypothèque sur l'immeuble arrivera à échéance et que le gouvernement fédéral retirera son aide.

Au cours d'une rencontre avec la presse, mercredi, le coordonnateur du FRAPRU, François Saillant, a soulevé l'incertitude qui entoure ce phénomène encore peu connu du retrait fédéral à venir des logements sociaux déjà construits.

L'aide fédérale versée pour des logements sociaux au Québec valait pour des ententes de longue durée. Or, la plus grande partie de ces ententes arriveront à échéance à la fin de la décennie 2010 ou au début des années 2020. Ainsi, lorsque l'hypothèque sur l'immeuble sera payée, le fédéral se retirera, ce qui risque d'entraîner des hausses de loyer importantes pour ces locataires à faible revenu, selon le FRAPRU.

«Ce qui est préoccupant là-dedans c'est que non seulement les listes d'attente pour des nouveaux logements sociaux s'allongent - du fait que les problèmes de logement s'accroissent à l'heure actuelle partout au Canada et au Québec - mais, en plus, on voit disparaître au fur et à mesure des logements sociaux qui, jusqu'ici, étaient abordables pour les ménages à faible revenu», s'est insurgée Marie-José Corriveau, organisatrice au FRAPRU, aux côtés de M. Saillant.

«Dans certains types de ces projets-là, par exemple, qui sont actuellement sous la seule supervision de la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHJL), quand ils perdent leur subvention (du fédéral), on assiste à des augmentations de loyer qui peuvent aller de 200 $ à 300 $ par mois par ménage, ce qui est énorme», a illustré Mme Corriveau.

Certains ménages quittent alors leur logement qui n'est plus subventionné par le fédéral. D'autres y demeurent, car les loyers restent tout de même moins coûteux que dans le marché privé locatif, souligne Mme Corriveau.

Au Québec, selon le FRAPRU, 125 900 logements sociaux bénéficiaient encore de l'aide fédérale, à la fin de 2012. Mais c'était déjà 1350 de moins qu'en 2010.

Confronté au problème du désengagement fédéral du logement social, «Québec a accepté pour le moment de prendre une forme de relais», admet Mme Corriveau, qui note qu'il ne s'agit que d'une solution temporaire. «Il remplace le gouvernement fédéral, sauf qu'ils le font uniquement pour les locataires actuels de ces logements-là. Le jour où ces locataires-là vont disparaître, la subvention n'existera plus et le logement ne sera plus disponible pour les ménages à faible revenu», déplore-t-elle.

L'organisme de défense des droits des locataires souhaite que le gouvernement fédéral maintienne son aide financière pour ces logements sociaux construits dans le passé, lorsque les ententes arriveront à échéance. Il lui demande également de rétablir l'aide au logement social qu'il a supprimée à partir de 1994. «Le retrait fédéral (de l'époque) a sonné le glas du programme de HLM», a déploré de son côté François Saillant.

Selon ses calculs, depuis 1994, le Québec a ainsi été privé de 64 995 logements sociaux. Il arrive à ces chiffres en multipliant sur le nombre d'années la moyenne de 5356 logements sociaux subventionnés par le fédéral par année, de 1985 à 1989. Il tient compte, toutefois, du fait que le gouvernement du Québec, pendant cette période, a continué à financer des logements sociaux.

Plus précisément, selon les calculs du FRAPRU, la ville de Montréal a ainsi été privée de 28 600 logements sociaux par ce retrait du gouvernement fédéral, la ville de Québec de 5900, la ville de Gatineau de 2200, celle de Sherbrooke de 1700, celle de Trois-Rivières de 1600 et celle de Saguenay de 1000.

M. Saillant signale que 40 000 ménages au Québec attendent un logement dans un HLM, dont 22 700 à Montréal.