«Je l'aimais comme un frère.» Brian Mulroney et Paul Desmarais étaient des intimes, au point où l'ex-premier ministre s'est rendu au chevet de son ami en fin de semaine.

«C'était un bâtisseur, un visionnaire, un rêveur réaliste», dit M. Mulroney.

Leur amitié datait de 48 ans et M. Mulroney a été aux premières loges de quelques-uns des gros coups de Paul Desmarais.

«J'étais avec lui le jour où il a acheté La Presse», lance M. Mulroney.

Quelques années plus tard, en 1972, c'est d'ailleurs à Brian Mulroney, l'avocat, que Paul Desmarais a confié le mandat de régler le lock-out à La Presse.

«Je lui avais dit: «Paul, si tu veux m'avoir comme avocat, il faut que tu me laisses carte blanche.»»

Quelques années plus tard, Brian Mulroney devenait premier ministre. De quelle manière cela a-t-il teinté leur relation?

«J'ai été premier ministre pendant neuf ans. Jamais il ne m'a demandé quoi que ce soit. Oui, il aimait être connu des décideurs, mais ce qu'il voulait, c'est que sa voix soit entendue dans les débats publics.»

Brian Mulroney ne cache pas qu'il a souvent demandé conseil à Paul Desmarais. «Je l'appelais et je lui demandais: «Que penses-tu de telle chose, de tel individu?» et sur un ton très catégorique, il me disait: «Ne touche pas à ça» ou alors: «J'ai connu ce groupe en telle année, méfie-toi...»»

Ensemble, ils ont aussi bien fait des voyages de chasse et de pêche que causé avec François Mitterrand, Ronald Reagan ou la reine Élisabeth.

M. Mulroney évoque cette fois où, à l'Élysée, il a soufflé à l'oreille de François Mitterrand que Napoléon, sa vie, son oeuvre n'avaient aucun secret pour Paul Desmarais, un fou d'histoire. «Il nous a alors emmenés dans une petite pièce, au premier étage de l'Élysée, et il nous a montré le document d'abdication de Napoléon.»

M. Mulroney se souvient aussi d'une de ces visites officielles de la reine au pays où elle avait formulé le souhait d'un petit souper tranquille. Triant les invités sur le volet, Brian Mulroney avait convié son ami Paul et sa femme, Jacqueline, de même qu'une poignée d'autres personnes, à «une soirée toute simple au 24, Sussex».

Quelque temps plus tard, de passage chez les Desmarais dans Charlevoix, M. Mulroney se souvient d'avoir vu Paul Desmarais en pleine discussion avec des travailleurs de la construction. Ce qui a frappé M. Mulroney, «c'est que son comportement avec eux était exactement le même que lors de notre souper avec la reine. Dans les deux cas, il était simple, direct, amical. Le même».

Avant toute chose, Paul Desmarais était un homme de famille, amoureux fou de sa femme.

Là-dessus, Brian Mulroney prend une pause et insiste: l'amour de ces deux-là "était unique». «Je n'ai jamais vu dans ma vie d'homme un amour aussi profond.»

D'autres gens d'affaires tirent non sans raison leur fierté de leurs grosses transactions, raconte encore M. Mulroney. «Ce n'était pas le cas de Paul. Sa joie, il ne la tirait pas de la transaction en tant que telle, mais de ce moment où il rentrerait à la maison, lancerait un : «Jackie, devine ce que j'ai fait aujourd'hui " et qu'elle lui répondrait: "Ça, c'est intelligent, mon Paul. " »

Au-delà de tout, conclut M. Mulroney, «la plus grande réalisation de Paul et de son épouse Jacqueline, ce sont leurs enfants. Le comportement de leurs enfants».