À l'heure où le gouvernement Marois promet plus «d'harmonie et de cohésion dans la société» avec la présentation de la Charte des valeurs québécoises, 40% des Québécois estiment que les immigrants affaiblissent l'unité du Québec.

À Montréal, où il y a une grande concentration de gens issus de l'immigration, cette perception se situe à 36%, alors qu'en région, ce pourcentage grimpe à 46%. Le concept d'unité n'est toutefois pas défini.

C'est ce que tend à démontrer un sondage mené sur l'internet à l'initiative de la firme SOM auprès de 1937 personnes, du 30 août au 5 septembre. Ce coup de sonde a donc été donné quelques jours avant que soit présentée officiellement la Charte des valeurs québécoises, bien que son contenu ait été partiellement dévoilé et débattu depuis déjà quelques semaines.

SOM a vérifié notamment si les répondants avaient entendu parler du projet gouvernemental d'une charte, ce qui était le cas à 90%. Quant au taux d'adhésion des internautes à l'idée qu'ils se faisaient de la Charte, il atteignait, la semaine dernière, 66%.

Perception des immigrants

Mais SOM a surtout profité du contexte pour poser une série de 10 questions afin de mesurer les perceptions des répondants à l'égard des immigrants. «Ça nous paraissait une question très forte dans l'actualité qui pouvait susciter de l'intérêt et l'occasion d'apporter un éclairage», explique Vincent Bouchard de SOM.

M. Bouchard souligne que les internautes qui appuient la Charte ont tendance à avoir une perception moins positive des immigrants. Il note également que les réponses varient en fonction du lieu de résidence.

Le professeur de droit de l'Université McGill et rapporteur spécial des Nations unies pour les droits de l'homme des migrants, François Crépeau, constate «la grande coupure» entre Montréal et les régions. «Les gens des régions pensent en effet que les immigrants affaiblissent l'unité du tissu canadien-français, ce qui est leur définition du Québec. Mais de quelle unité parle-t-on? C'est la sainte flanelle. C'est l'unité canadienne-française traditionnelle. C'est comme ça que je l'interprète», affirme M. Crépeau.

Sa collègue de l'UQAM, Maryse Potvin, professeure en sciences de l'éducation et spécialiste des rapports ethniques, rappelle que «dans un contexte tendu, les idées sont souvent exacerbées». «Il y a une proportion de gens qui se sentent menacés, et c'est surtout vrai en région, comme tendent à le montrer ce genre de sondages-là, parce qu'ils ne vivent pas dans la diversité, qu'ils connaissent moins les immigrants et les minorités religieuses et qu'ils pensent que le Québec est en train de disparaître», indique Mme Potvin.

Cette dernière retient surtout du sondage SOM les éléments positifs qui ressortent. Ainsi, 67% des répondants croient que «c'est bon pour le Québec d'avoir plusieurs groupes qui habitent dans la province, chacun avec ses différences culturelles», et 68% estiment que les immigrants font beaucoup d'efforts pour trouver un emploi.