Bruno Fortier, ex-délégué général du Québec à New York et ami d'enfance de Jean Charest, limogé dans la controverse en 2008, a tenté de se débarrasser d'une employée qui l'accusait de harcèlement.

C'est ce qui ressort d'un jugement de la Cour supérieure publié le mois dernier. M. Fortier réclamait 1,3 million en dédommagement à la suite de son renvoi «abusif». Il n'a obtenu que 10 000$.

Il «a dû subir le dévoilement à un tiers de ses effets personnels et de ses papiers» parce que le gouvernement lui avait interdit de vider sa résidence de fonction, ce qui constituait une faute et nécessitait une compensation, selon le juge Louis-Paul Cullen. Insatisfait du jugement, M. Fortier a interjeté appel.

Le congédiement de Bruno Fortier avait déclenché une forte controverse au printemps 2008. Le premier ministre Charest avait même été obligé de témoigner devant une commission parlementaire pour expliquer ce qu'il savait du dossier - une procédure exceptionnelle très rarement vue à Québec.

Gestes déplacés

En octobre 2007, trois mois après son entrée en fonction comme délégué général du Québec à New York, M. Fortier a rencontré deux employées dans les bureaux de la délégation. Après cette rencontre, une employée identifiée comme «F. M.» a soutenu auprès de son supérieur André Prince que le délégué général a fait des gestes «obscènes, à caractère masturbatoire» devant elle et une autre employée, Mme «A. E.-V.».

«Selon M. Prince, Mme M. lui déclare que Mme E.-V. ne la corroborera pas parce qu'elle est une proche de la fille du premier ministre», relate le jugement. Bruno Fortier est un ami de Jean Charest et c'est lui qui l'a personnellement averti de sa nomination.

Selon la décision judiciaire, Bruno Fortier a fait valoir qu'il avait une cicatrice près des parties génitales, ce qui lui cause parfois des démangeaisons.

Le 18 octobre 2007, M. Prince a avisé M. Fortier des allégations qui pesaient contre lui. Le délégué général a choisi de ne pas transmettre l'information à Québec «en dépit du fait qu'elles sont sérieuses», a écrit le juge Cullen. Deux jours après ces communications, les deux hommes se sont échangé un plan prévoyant «trois terminaisons d'emploi, y compris l'emploi de MmeM...»

Bruno Fortier sera finalement rappelé à Québec le 14 mars 2008, sans qu'on l'avertisse que c'était pour le congédier et sans possibilité de remettre les pieds dans sa résidence.

Dans les semaines précédentes, il avait tenté d'accélérer la mise en place de son plan de ressources humaines, malgré les réserves émises par le Ministère, puis avait modifié les tâches de F.M. Au procès, Bruno Fortier a assuré avoir obtenu l'autorisation d'agir ainsi. «Invraisemblable», a commenté le juge. Le gouvernement plaidait le contraire.

La plainte pour harcèlement a été retirée après le congédiement de Bruno Fortier.

Contactés par La Presse, Bruno Fortier et le ministère des Relations internationales ont tous deux refusé de commenter le dossier, étant donné qu'on a interjeté appel.

Dans les documents qu'il a récemment déposés à la Cour d'appel, M. Fortier soulève quatre potentielles erreurs commises par la Cour supérieure. Il espère toujours recevoir 1,3 million de Québec.

Bruno Fortier est maintenant consultant dans le monde des affaires.