Les Acadiens craignent que leur droit à l'éducation et aux soins de santé en français soit menacé dans une province maritime unie. Si bien qu'un regroupement francophone du Nouveau-Brunswick pourrait s'adresser aux tribunaux si le projet devait aller de l'avant.

Bruno Godin, qui dirige la Société de l'Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), n'est «pas du tout» d'accord avec le projet de fusion de sa province avec la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard. Dans la seule province bilingue du Canada, les francophones craignent d'être marginalisés dans une province maritime unie.

On compte 230 000 Acadiens au Nouveau-Brunswick, soit 32% de la population. Des 55 circonscriptions provinciales, 20 sont majoritairement francophones et 5 autres le sont à moitié. «Un gouvernement, actuellement, ne peut pas prendre le pouvoir sans l'appui des francophones, souligne M. Godin. Qu'est-ce que ce serait dans une nouvelle province unie? Si l'on passait à 75 circonscriptions, combien resteraient francophones? Cinq?»

Le statut bilingue du Nouveau-Brunswick permet aux Acadiens d'être instruits et soignés en français. Dans une province unie où les francophones ne constitueraient plus que 15% de la population, M. Godin craint que ce droit soit mis en péril. Son organisme pourrait donc s'adresser aux tribunaux pour le protéger.

Une province unie bilingue?

Les promoteurs de l'union ne sont pas insensibles à la préoccupation des francophones. Dans un discours prononcé au début du mois de décembre, le sénateur Stephen Greene, de la Nouvelle-Écosse, a rappelé que la dernière fois que le projet a été étudié dans les années 60, il avait été convenu que les droits des francophones seraient une condition sine qua non d'une entente éventuelle.

Donald Savoie, professeur d'administration publique à l'Université de Moncton, se dit convaincu qu'une province unie serait en mesure de protéger les droits des Acadiens du Nouveau-Brunswick. Mieux, dit-il, il serait possible de les étendre aux Acadiens de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard, qui sont actuellement dans une situation beaucoup plus minoritaire.

«On critique beaucoup le Québec parce qu'il considère que les francophones hors Québec sont des cadavres chauds, observe-t-il. Mais on a un peu le même problème au Nouveau-Brunswick. Est-ce que les Acadiens du Nouveau-Brunswick ne considèrent pas un peu que les Acadiens de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard sont des cadavres chauds?