À peine la Coupe Rogers terminée, les courts de tennis du parc Jarry ont rapidement été transformés en terrain de soccer de plage. Mais un nuage gris plane au-dessus du stade Uniprix. Christian Prévost, directeur technique de Beach Soccer Montréal 2012, n'arrive pas à croire que le Maroc ne pourra pas disputer son premier match contre l'Italie ce soir, ni aucune des parties prévues demain et dimanche.

«On a dit aux joueurs qu'ils n'avaient pas un revenu financier suffisant. On craint qu'ils veuillent rester ici après le tournoi. C'est une brique que nous avons reçue sur notre tournoi, cette semaine», affirme-t-il.

Moustapha El-Haddaoui, entraîneur de l'équipe, est consterné. Seuls trois membres de l'entourage de l'équipe et lui ont reçu l'autorisation de voyager au Canada. «Les gars ont de bonnes situations, ici, a-t-il dit. Ils jouent dans des clubs de première division. Ils n'allaient pas se barrer. C'est une honte! C'est inadmissible. C'est une grande déception. Ces joueurs ont des contrats. Ce n'est pas une équipe de rue ou de quartier!»

Le Maroc sélectionne les meilleurs joueurs du pays pour former son équipe nationale. Dans la dernière année, ils ont participé à plusieurs tournois à l'étranger, notamment en France, en Suisse, en Belgique et en Afrique du Sud. Selon M. El-Haddaoui, c'est la première fois qu'on leur refuse le droit d'entrée dans un pays.

L'équipe marocaine ne compte pas rester les bras croisés devant la décision d'Ottawa. Elle promet de formuler une plainte à la Fédération internationale de football association (FIFA). «Le sport est censé unir toutes les nations, tous les peuples», rappelle M. El-Haddaoui.

Les organisateurs du tournoi de soccer de plage encaissent également un dur coup financier puisqu'ils avaient payé les billets d'avion et l'hôtel des 10 joueurs. M. Prévost craint également que les partisans de soccer maghrébins décident de bouder le tournoi. Ce sont des joueurs canadiens, dont des Québécois, qui remplaceront l'équipe marocaine.

Sept critères à respecter

L'arrondissement de Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension, où se déroule le tournoi en fin de semaine, mise beaucoup sur le soccer pour tirer les jeunes de la rue, affirme Anie Samson, mairesse de l'arrondissement. Elle est d'autant plus déçue que le Petit Maghreb se trouve dans son secteur de la ville. «Ce qui est dommage, c'est que ce ne sont pas des petits jeunes. Ils ont fait leurs preuves et ont voyagé dans plusieurs pays pour participer à des compétitions. Le Canada est censé être ouvert et sensible au multiculturalisme. On leur a dit que leur revenu n'était pas assez élevé, mais ils ont seulement 20 ans. Ils commencent leur carrière.»

L'arrondissement souhaite obtenir la Coupe du monde de soccer de plage féminine l'année prochaine, mais Mme Samson craint que la FIFA ne décide d'accorder le tournoi à un pays où les joueurs n'auront pas de difficulté à obtenir un visa.

Le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration assure pour sa part que les voyageurs étrangers ne doivent pas avoir un revenu minimal pour pouvoir voyager au Canada. Ils doivent cependant respecter sept critères, comme convaincre l'agent des visas qu'ils «quitteront volontairement le Canada à la fin de la période de séjour autorisée» ou «avoir suffisamment d'argent pour subvenir à leurs besoins et à ceux des membres de leur famille pendant leur séjour au Canada».

«La situation familiale et économique globale est évaluée par l'agent des visas. Les demandes sont évaluées au cas par cas. Toutes les demandes sont évaluées de manière égale, par l'entremise de critères ne tenant pas compte du pays d'origine du requérant», assure Julie Lafortune, porte-parole du Ministère, qui refuse toutefois de fournir davantage de détails sans l'autorisation écrite des joueurs marocains.

Le tournoi qui commence ce soir perdra peut-être quelques partisans mais, même absents, les Marocains auront tout de même le mérite d'avoir fait connaître le soccer de plage à certains Canadiens.