Plus de 40 importations d'aliments se sont fait refuser l'entrée au Canada par l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) au cours des neuf premiers mois de 2011-2012. Il s'agit d'une hausse de 31% du nombre de produits bloqués par rapport à la même période l'an dernier.

Ces envois - qui provenaient surtout des États-Unis, du Mexique et de la Chine - n'ont pas pu entrer au pays «parce qu'ils ne respectaient pas les exigences réglementaires» ou parce que certains renseignements exigés étaient manquants ou inexacts, selon l'ACIA. Fruits, légumes, viandes, noix, bonbons: les denrées qui n'ont pas pu franchir la frontière sont très variées.

Les Canadiens consomment énormément d'aliments et de produits agricoles importés: leur valeur a atteint 30,7 milliards en 2010. Plus de 190 pays nous envoient des aliments. Même si leur nombre est en hausse, peu de colis se voient refuser l'entrée. Il faut toutefois garder en tête le fait que l'agence fédérale inspecterait seulement de 2% à 5% des marchandises alimentaires.

Risques du marché mondial

Consciente des «risques du marché mondial actuel, de plus en plus complexe», l'ACIA élabore actuellement un nouveau règlement visant à renforcer la salubrité des aliments importés. Une mesure nécessaire, selon Sylvain Charlebois, doyen associé au Collège de management et d'études économiques de l'Université de Guelph et membre du comité consultatif d'experts de l'ACIA.

«On importe de plus en plus de produits, notamment alimentaires, observe M. Charlebois. Il faut par conséquent augmenter notre niveau de surveillance, augmenter sa qualité ou changer la façon de surveiller les risques à l'importation.»

L'ACIA exigera bientôt de tous les importateurs d'aliments qu'ils détiennent un permis (ce n'est pas le cas actuellement) et qu'ils prennent eux-mêmes des mesures pour empêcher que des aliments insalubres n'entrent au pays. Une consultation se déroule jusqu'au 29 juin en ce qui concerne les frais de délivrance du permis que devront payer les importateurs.

«On a toujours dénoncé le fait qu'il n'y a pas assez d'inspecteurs à l'importation, et le nouveau règlement n'en ajoutera pas», a affirmé Raphaël Tarasco, troisième vice-président du Syndicat de l'agriculture.

«Ce qu'on vise, ce sont les acteurs et non pas les produits, a expliqué M. Charlebois. Parce que surveiller l'ensemble des produits, c'est impossible.» Par exemple, le Canada importe plusieurs centaines de milliers de tonnes de bananes par an. Inspecter chaque banane est irréaliste, surveiller les importateurs de bananes l'est moins, affirme-t-il.

L'ACIA davantage présente à l'étranger

L'ACIA va aussi «jouer un rôle plus proactif à l'international, a révélé l'expert. L'Agence va aider certains partenaires de pays en voie de développement, comme le font le Japon et les États-Unis.»

En vertu de la loi d'accès à l'information, La Presse a demandé les données et rapports de l'ACIA portant sur les produits alimentaires dont l'entrée au Canada est refusée, pour mieux comprendre les raisons de ces rejets.

L'Agence ne semble pas vouloir divulguer ces informations: après six mois d'attente, elle a envoyé une série de tableaux difficiles à comprendre, en anglais seulement, ne faisant état d'aucun motif de refus. Personne à l'ACIA n'a pu expliquer le contenu de ces tableaux au cours des deux derniers jours.

-Avec la collaboration de William Leclerc

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«Relever la barre» de l'inspection au Canada


L'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) veut «relever la barre» de l'inspection des aliments au Canada, selon ses propres mots. Jusqu'au 31 juillet, l'ACIA tient une consultation sur le «modèle amélioré d'inspection des aliments» qu'elle compte implanter.

Elle propose qu'une méthode d'inspection uniforme s'applique à l'ensemble des aliments importés ou produits au pays. Actuellement, l'inspection des oeufs est distincte de celle des fruits et des légumes, des poissons, de la viande, etc.

L'ACIA souhaite aussi «laisser à l'industrie la responsabilité de concevoir et de mettre en oeuvre des plans de contrôle préventif propres à ses activités». Le rôle de l'Agence consistera ensuite à vérifier les plans de l'industrie, ce que dénonce Raphaël Tarasco, troisième vice-président du Syndicat de l'agriculture. «Responsabiliser l'industrie, c'est leur vision, a-t-il dit. Mais on peut se retrouver avec de grosses industries qui dérapent, comme on l'a vu avec la crise de la listériose chez Maple Leaf.»

Aliments refusés au Canada (neuf premiers mois de 2011-2012)

> Total 42

> Importations d'aliments, provenant de 18 pays.

> Hausse de 31% par rapport à la même période en 2010-2011.

Principaux pays d'origine des aliments refusés:

> États-Unis 16 envois refusés

> Mexique 6 envois refusés

> Chine 3 envois refusés

> Espagne 2 envois refusés

Exemples d'aliments refusés

Bleuets, boeuf, bonbons, confitures, jambon, miel, mûres, oeufs au plat prêts à servir, paniers-cadeaux de saucisses et de fromages, pâtes primavera au boeuf, poires, poitrines de poulet fraîches, pommes de terre, quinoa, tapenade d'olives, veau.