Un fléau ravage les jeunes Innus: les amphétamines (speeds), une drogue de synthèse qui provoque un sentiment d'euphorie et de bien-être et qui supprime les inhibitions.

«Nos enfants trouvent des pilules qui ressemblent à des bonbons!», s'indigne Constance Vollant, porte-parole d'un groupe de parents d'Uashat-Maliotenam (une communauté innue divisée en deux, de part et d'autre de Sept-Îles).

La Dre Isabelle Gingras, psychiatre à l'hôpital de Sept-Îles, confirme: «Les comprimés peuvent se vendre 2$ ou 3$ chacun et sont très faciles à trouver dans la région.»

«Le PCP a été remplacé par d'autres drogues de synthèse, notamment le speed. C'est un problème très présent dans les communautés innues et, je vous dirais, sur la Côte-Nord en général. Nos statistiques montrent même qu'il est beaucoup plus important que dans le centre-ville de Montréal.»

Plus de 90% des jeunes adultes admis à l'hôpital de Sept-Îles pour psychose ont pris des drogues, surtout de synthèse, souligne-t-elle. «Quand on fait des recherches de drogue [dans les tests de laboratoire] et qu'on ne trouve rien, on tombe en bas de notre chaise. On a le réflexe de faire un deuxième contrôle pour s'assurer que ce n'est pas un faux négatif.»

La Dre Gingras traite les adultes, autochtones ou non, mais pas les enfants. Par conséquent, elle n'a pas une connaissance directe des ravages des amphétamines chez les mineurs innus. En revanche, elle constate que le nombre de patients innus admis en psychiatrie est plus important maintenant qu'à son arrivée à l'hôpital de Sept-Îles, il y a six ans.

Mobilisation

L'été dernier, Constance Vollant a organisé une manifestation à la chandelle pour amener les conseils de bande à s'attaquer plus sérieusement au trafic et à la consommation de drogues de synthèse par les jeunes Innus. Les stations de radio communautaires ont diffusé des témoignages; une chandelle a été allumée à Pessamit puis a été symboliquement transmise par les ondes aux autres communautés.

«Il y a un important trafic de drogues de synthèse dans les communautés, a dit Mme Vollant, jointe par téléphone. Il a augmenté avec le chantier de La Romaine et va augmenter encore avec le Plan Nord. Les non-autochtones apportent plus de drogues.

«Mais nos services sociaux manquent de budget. Ils manquent de psychologues et de psychiatres. Les programmes de prévention dans les écoles sont insuffisants... quand il y en a.»

La sortie du député Bonnardel

L'automne dernier, le député adéquiste François Bonnardel a dénoncé le fait que des chèques de 3000$ ont été versés à chaque adulte de la communauté de Mingan, à la suite d'une entente conclue avec Hydro-Québec pour la construction de centrales hydroélectriques sur la rivière Romaine.

Il a affirmé que cette pratique était néfaste compte tenu du fait que 40% de la population a des problèmes de toxicomanie. Le premier ministre Jean Charest l'a accusé «de peinturer les Premières Nations comme étant des alcooliques et des toxicomanes».

Mais des Innus de La Romaine ont écrit à M. Bonnardel pour le remercier: «Nous vous appuyons d'avoir sonné l'alarme au sujet des problèmes sociaux très graves que vivent les Innus de la Basse-Côte-Nord, ont-ils écrit. Quoique des problèmes existaient, l'arrivée des chantiers d'Hydro-Québec et du Plan Nord les a amplifiés à des proportions hors contrôle.»