Un militaire des Forces canadiennes a été accusé lundi d'avoir transmis à un pays étranger des informations pouvant affecter les intérêts du Canada.

Le cas devrait faire réaliser aux Canadiens que leur pays n'est pas immunisé aux efforts d'espionnage d'autres pays, selon Bob Paulson, le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada.

Jeffrey Paul Delisle, âgé de 40 ans, a comparu en cour provinciale à Halifax pour faire face à deux accusations en vertu de la Loi sur la protection de l'information.

Les documents judiciaires indiquent que l'une des présumées violations aurait eu lieu entre le 6 juillet 2007 et le 13 janvier 2012, alors que la seconde se serait produite la semaine dernière.

Delisle, qui habite la région de Halifax, devra aussi se défendre contre une accusation d'abus de confiance portée en vertu du Code criminel. Cette infraction se serait aussi produite entre le 6 juillet 2007 et le 13 janvier 2012.

Toutes les accusations sont liées à des faits présumés qui se seraient produits dans les secteurs de Halifax, d'Ottawa et de Kingston, en Ontario.

Delisle a été accusé en vertu d'une nouvelle section de la Loi sur la protection de l'information, adoptée par les Communes dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001.

Selon la Gendarmerie royale du Canada (GRC), il s'agit de la première fois qu'un Canadien se fait reprocher d'avoir contrevenu à ces dispositions. Son commissaire, Bob Paulson, a émis un communiqué au sujet des accusations, mais n'a pas révélé de détails concernant les informations qui auraient été transmises.

«Malgré la gravité des accusations, la GRC n'a décelé aucune menace pour la sécurité publique liée à cette situation à l'heure actuelle», a-t-il déclaré.

«L'enquête démontre que le Canada n'est pas à l'abri des menaces que constituent les entités étrangères qui cherchent à porter atteinte à la souveraineté du Canada. Nous devons toujours faire preuve de vigilance à l'égard de la menace réelle d'espionnage étranger ainsi que continuer de consacrer du temps et des ressources à la prévention et à la détection de tels actes de même qu'aux enquêtes et aux poursuites s'y rattachant.»

Delisle devra rester derrière les barreaux jusqu'à mardi, lorsqu'il reviendra en cour.

Le ministère de la Défense a fait savoir que Jeffrey Paul Delisle est un sous-lieutenant de la marine et un agent du service de renseignement.

Des sources ministérielles ont également mentionné que l'homme travaillait dans un centre de renseignements et de communications de la marine à Halifax, où il était possible d'avoir accès aux informations confidentielles de pays membres de l'OTAN.

Elles ont ajouté que Delisle avait joint les rangs de la marine comme réserviste, en 1996, avant de devenir un membre à part entière des forces armées en 2001. Il a été promu officier en 2008, soit après avoir prétendument divulgué des informations.

En entrevue avec La Presse Canadienne, un expert en matière de sécurité a expliqué que des soupçons d'espionnage menaient rarement, au Canada, à des poursuites criminelles.

«Il existe d'autres méthodes que nous tentons d'utiliser pour faire cesser ces activités ou faire savoir aux individus impliqués qu'ils sont sous surveillance, ou encore qu'ils seront renvoyés dans leur pays d'origine», a mentionné Wesley Wark, un professeur de l'Université de Toronto.

Il a ajouté que cette réticence des autorités à déposer des accusations était notamment liée au fait qu'elles souhaitaient empêcher la divulgation d'informations confidentielles en cour.

M. Paulson a indiqué que l'enquête impliquait le Service canadien du renseignement de sécurité, les Forces canadiennes et l'Agence des services frontaliers du Canada.

«Grâce à leur dévouement et à leur détermination, les femmes et les hommes de la GRC qui ont travaillé avec diligence à cette enquête ont eu des effets positifs sur la sécurité des Canadiens et sur la protection de la souveraineté de notre pays», a-t-il écrit.