Les deux nouveaux juges nommés à la Cour suprême du Canada ont été officiellement accueillis par leurs pairs, lundi, lors d'une cérémonie de bienvenue pendant laquelle ils se sont rappelé leurs origines modestes.

Michael Moldaver et Andromache Karakatsanis ont été nommés à la Cour suprême par le premier ministre Stephen Harper le mois dernier. Ils ont été assermentés en privé lundi avant la cérémonie officielle de bienvenue.

Le juge Moldaver, âgé de 63 ans, a fait rire l'assistance quand il a raconté son enfance dans un milieu ouvrier de Peterborough, en Ontario, mais a semblé ému quand il a parlé des sacrifices consentis par ses parents, qui n'ont pas, eux, bénéficié de l'enseignement supérieur.

Il a affirmé que son père était un homme de sagesse qui comprenait bien la nature humaine, même s'il n'avait pas fréquenté l'université.

La juge Karakatsanis, âgée de 56 ans, a raconté que ses parents avaient émigré de la Grèce après la Seconde Guerre mondiale pour amorcer une nouvelle vie au Canada. Elle s'est rappelé que ses parents étaient venus seuls, sans argent et sans connaître la langue du pays, mais qu'ils étaient venus avec courage et espoir.

La nomination de Michael Moldaver à la Cour suprême a été critiquée par plusieurs groupes francophones du pays parce qu'il n'est pas bilingue, même s'il a dit qu'il apprendrait le français.

M. Moldaver, qui a prononcé quelques phrases en français lundi lors de la cérémonie, a dit être guidé par l'exemple de son père, qui était selon lui doté de bon sens et d'un bon jugement.

Il a aussi blagué sur sa comparution devant le comité ad hoc de la Chambre des communes après l'annonce de sa nomination. Il avait alors promis aux députés de faire tout son possible pour apprendre le français.

Le juge Moldaver a affirmé que quand les gens lui parlent de sa comparution devant le comité des Communes, il leur donne toujours la même réponse. «Je leur dis que c'est comme faire de l'exercice: ce n'est pas très agréable quand on le fait, mais on se sent bien mieux quand c'est fini».

Indépendance judiciaire

Les nouveaux juges, des Ontariens, sont tous deux issus de la Cour d'appel de cette province. Ils remplaceront Ian Binnie, âgé de 72 ans, et Louise Charron, âgée de 60 ans, qui ont pris leur retraite cet automne.

Le juge Moldaver avait été nommé à la Cour suprême de l'Ontario en 1990, avant d'être désigné à la Cour d'appel provinciale cinq ans plus tard.

Mme Karakatsanis a quant à elle été procureure générale adjointe de l'Ontario, pour ensuite être nommée en 2002 à la Cour supérieure de la province, puis à la Cour d'appel en 2010.

Elle a rappelé lundi ses 15 ans de services à titre de fonctionnaire en Ontario, soutenant qu'elle en avait retiré une compréhension approfondie des rouages d'un gouvernement, ainsi qu'un «profond respect» pour la démocratie parlementaire.

M. Moldaver et Mme Karakatsanis sont les troisième et quatrième juges désignés par le premier ministre Stephen Harper pour siéger au plus haut tribunal du pays, formé au total de neuf juges.

Certains experts ont toutefois affirmé qu'avec ces nominations, le premier ministre Harper avait l'occasion de modeler la Cour suprême à son image, une cour qui serait moins encline à s'engager dans la voie de «l'activisme judiciaire».

Les deux nouveaux juges de la Cour suprême ont cependant insisté sur l'importance d'une justice impartiale.

Lors de sa récente comparution devant un comité parlementaire, M. Moldaver avait souligné que la cour avait le droit d'invalider des lois puisque «les juges ont le droit de diriger les gouvernements en matière de politiques. En vertu de la Constitution, nous avons l'autorité requise pour juger de la légalité des lois adoptées par le Parlement et les législatures», avait-t-il fait valoir.

Mme Karakatsanis a ajouté que son passage dans la fonction publique, puis dans le système judiciaire, lui avaient confirmé que la primauté du droit est la pierre angulaire de la démocratie, et qu'une justice indépendante est «au coeur même» du système.