À peine débarquée à Montréal, une jeune Française a vu son voyage au Canada tourner court: faute d'un permis de travail à présenter à la douane, elle a été renvoyée par le premier vol vers la France. Son séjour à Montréal aura duré moins de deux heures.

C'est avec excitation que Marie Bouré, étudiante en mode âgée de 19 ans, est partie début septembre pour Montréal, où elle devait faire un stage non rémunéré de deux mois auprès de deux créatrices québécoises. Mais de Montréal, elle n'aura vu que les douanes de l'aéroport.

Ignorant qu'elle devait en faire la demande, elle s'est en effet présentée sans permis de travail aux douanes. Les agents d'immigration ont appliqué la procédure habituelle, ne l'ont pas laissée entrer au Canada et l'ont remise à bord du premier vol vers la France. Le tout, à ses frais.

Partie de Paris, Marie a atterri à Nice, à plus de 800 km de chez elle, où elle a été accueillie par les autorités françaises. «Je n'y croyais pas, jusqu'au bout j'ai cru qu'on allait pouvoir s'arranger», dit-elle, étonnée par l'intransigeance d'un pays à propos duquel on entend habituellement «des choses très gentilles».

La mère de Marie, Sylvianne, regrette le peu d'empathie des agents canadiens, qui, selon elle, ont traité sa fille avec «cruauté». «On l'a remise dans le premier avion qui passait, on lui a confisqué son passeport, et c'est la police qui est venue la chercher à Nice, dit-elle. On peut faire son boulot, mais sans faire d'excès de zèle!»

Mais pour l'Agence des services frontaliers (ASFC), qui, chaque année, remet dans un avion une cinquantaine de Français venus faire un stage sans permis de travail, la loi doit être appliquée. «Nous comprenons la déception du voyageur qui est ainsi renvoyé dès son arrivée», dit toutefois Jacqueline Roby, porte-parole de l'ASFC. Refusant de commenter ce dossier précis, Mme Roby souligne qu'un comportement courtois est attendu des agents.

Un malentendu qui n'est pas inhabituel

Au consulat de France à Montréal, les témoignages comme celui de Marie sont fréquents, surtout autour de la rentrée universitaire. «Il ne se passe pas une semaine sans qu'on nous signale des cas», dit Bruno Clerc, consul général de France à Montréal. Pour ces jeunes, c'est souvent la douche froide. «Je ne veux pas juger ce qui se fait, mais c'est vrai que c'est difficile à vivre», dit M. Clerc.

Trop souvent, les jeunes Français ignorent qu'il leur faut un permis d'étude ou de travail avant d'arriver au Canada, même pour un stage non rémunéré.

Des efforts de communication ont été déployés par la diplomatie québécoise et canadienne, mais, constate M. Clerc, «des éléments passent encore dans les mailles du filet».

L'expulsion est alors non seulement immédiate, mais irréversible. «Il faut rappeler notre message: on ne vient pas au Canada ou au Québec sans être en situation régulière et sans avoir tous les visas requis», dit M. Clerc. Et surtout, il ne faut pas croire que l'on peut «négocier» avec les autorités. «On est en Amérique du Nord, ici, et on ne ment pas aux autorités», dit-il.

D'abord échaudée par son aventure, Marie espère tout de même revenir un jour au Québec. «Je ne vais pas m'arrêter sur une mauvaise expérience. C'est comme quand on tombe en vélo, il faut remonter tout de suite», croit-elle.