Peu avant son abolition prévue par le gouvernement, le Conseil des relations interculturelles (CRI) dénonce la politique d'immigration du Québec, qui ne permettrait pas d'intégrer les nouveaux arrivants au marché du travail. «Le taux de chômage chez les immigrants est trop élevé, et c'est en partie à cause de la grille de sélection», soutient la présidente du CRI, Patricia Rimok.

Elle risque toutefois de ne pas pouvoir présenter ses arguments aux consultations du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles sur le plan d'immigration 2012-2015. Les consultations ont commencé mardi. Elles font relâche jusqu'à août. Le projet de loi 130 pour abolir une trentaine d'organismes publics, dont le CRI, pourrait fort bien avoir été adopté d'ici là. Selon le Conseil du Trésor, ces abolitions permettront de réduire les dépenses et augmenter l'efficacité de l'État. Le gouvernement promet de rapatrier ces services pour les maintenir, ce qui se soldera par l'ajout de plus de 100 fonctionnaires.

Grille de sélection

Pendant ce temps, le CRI demande de changer la grille de sélection des immigrants économique - une catégorie qui exclut les programmes de réunification familiale et de réfugiés, qui relèvent du fédéral. La catégorie économique compte pour 65% des immigrants québécois. Il faudrait ajouter plus de points à l'expérience de travail, plaide Mme Rimok. Ce critère compte trois fois moins dans la grille québécoise que dans celles des autres provinces. Elle voudrait aussi que l'évaluation de l'expérience soit mieux arrimée aux besoins du marché du travail. Le ministère de l'Emploi devrait s'en assurer.

«Il faudrait aussi ajouter un nouvel élément à la grille, les compétences pour le travail», ajoute-t-elle. Selon un rapport du vérificateur général publié l'année dernière, seulement 9% des travailleurs qualifiés répondent aux besoins dans les domaines de formation privilégiés par le Québec, comme la haute technologie ou l'agriculture.

«Une des raisons pour lesquelles le chômage est élevé chez les immigrants, c'est qu'on évalue mal les compétences, déplore la présidente du CRI. Prenons l'exemple d'un ingénieur tunisien spécialisé dans les travaux sur les sols. Grâce à sa formation et à son français, il se qualifie. Une fois installé au Québec, on réalisera qu'il n'est pas formé pour les sols du Québec. Si on avait évalué ses compétences au départ, on l'aurait orienté autrement. Il faut réussir à régler les problèmes en amont.»

Le CRI s'inquiète aussi des délais. Selon leur pays d'origine, les immigrants doivent attendre de 18 mois à 5 ans entre leur demande et leur arrivée. L'organisme salue la mesure annoncée par la ministre de l'Immigration Kathleen Weil, qui veut imposer des tests de français «standardisés» pour identifier les immigrants qui ne maîtrisent pas assez le français pour réussir au travail. Mais selon Mme Rimok, le gouvernement devrait aussi s'inspirer de la FTQ, dont le programme de francisation est adapté au métier du nouvel arrivant. Il apprend donc le lexique lié à son travail pour mieux pouvoir s'y intégrer.