«S'il n'y a pas de militants péquistes, il n'y a pas de députés péquistes. Et s'il n'y a pas de députés péquistes, il n'y a pas de gouvernement du Parti québécois!»

Militant souverainiste, Sylvain Lépine avait pris le micro au congrès du parti de Lucien Bouchard. On nageait alors dans le débat linguistique - une faction du parti voulait le retour à l'affichage unilingue français, se souvient Pierre Boileau, alors directeur général du PQ.

C'était bien avant que le jeune avocat ne soit nommé procureur-chef de l'Unité permanente de lutte anticorruption par le gouvernement du Québec. Choisi cette semaine, l'avocat montréalais n'a pas voulu accorder d'entrevue pour se présenter. Au bureau du Directeur des poursuites criminelles et pénales, Martine Bérubé dessine à larges traits le parcours de ce procureur de choc qui a été reçu au barreau en 1987. Avant de faire son droit à Sherbrooke, il avait obtenu un certificat en sciences politiques à Montréal.

Depuis 2009, Me Lépine était le principal procureur-chef adjoint de l'escouade Marteau pour l'ouest du Québec, le groupe de la SQ spécialisé dans la lutte contre la corruption dans le secteur de la construction. Il n'a fait qu'une seule apparition médiatique, bien brève: dans une entrevue, il avait relevé que les lois censées contrer la collusion et la fraude envers les corps publics remontaient aux années 40, voire jusqu'en 1914. De là à dire que le procureur se plaignait de lois vétustes, il n'y avait qu'un pas, vite franchi.

Dans la foulée, il avait reconnu que les procureurs y pensent à deux fois avant d'accuser des gens connus: «Un procureur qui reçoit un dossier de gens qui sont plus connus va porter une attention différente», avait-il laissé tomber.

Il n'a plus accordé d'entrevue depuis.

Avant de passer à l'escouade Marteau, à l'automne 2009, le procureur Lépine s'était fait remarquer dans les dossiers de Cinar et d'Earl Jones, le faux conseiller financier. Après son barreau, il avait pratiqué au privé quelques années en droit du travail et en droit bancaire avant de devenir substitut du procureur général, en 2002, d'abord dans des dossiers de cybercriminalité.

Auparavant, il avait été attaché politique «à temps partiel» des ministres David Cliche et Serge Ménard. Joint cette semaine, Me Ménard ne se souvenait pas de son ancien employé.

Ceux qui l'ont côtoyé dans sa période de militant péquiste soulignent que ses sorties emportées au micro ne reflètent pas sa personnalité. «C'était un faux dur... Il était arrivé à Montréal-Ville-Marie dans un contexte de contestation. Il était porté par son instance, mais ce n'était pas un gars conflictuel», se souvient François Leblanc, alors au cabinet de Lucien Bouchard. Lépine faisait tandem avec Bruno Viens, le président de Montréal-Centre, associé plus clairement, lui, à l'aile plus radicale du PQ.

L'avocat avait été président de l'Association péquiste de Crémazie de 1989 à 1994. Il a été président de la douzaine de circonscriptions de la région Ville-Marie de 1994 à 1996.