«Vous êtes-vous déjà montré nu en public?» «Avez-vous déjà changé des étiquettes de prix sur un article afin de le payer moins cher?» C'est après avoir répondu à ce type de questions au cours d'une entrevue assortie d'un test au détecteur de mensonges que, depuis 2009, près de la moitié des candidats à un emploi à la GRC ont été recalés.

De 2005-2006 à 2008-2009, la proportion de candidatures rejetées a oscillé entre 30 et 35%, indiquent des statistiques obtenues par La Presse en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Depuis, ce pourcentage a bondi à 45%. Au total, depuis 2005 et jusqu'au 10 mars 2011, 4491 des 12 457 candidats qui ont passé un test polygraphique préalable à l'emploi (TPPE) ont été «non recommandés», selon la terminologie employée par la GRC dans ses statistiques. «Il n'y a pas de réussite ou d'échec fondé exclusivement sur les résultats du polygraphe», a dit la GRC à La Presse.

La GRC utilise le détecteur de mensonges depuis novembre 2005 pour déterminer l'«admissibilité et la fiabilité» des candidats. Ces derniers doivent franchir avec succès cette étape avant de se soumettre à un examen médical et à une enquête sur leurs antécédents. Il n'y a aucune surprise puisque le questionnaire est affiché sur le site internet de la Gendarmerie royale. Il comprend 95 questions sur les sujets les plus variés, anodins dans certains cas, parfois étonnants. Ce questionnaire a été remanié en 2007 après que le Commissariat à la protection de la vie privée eut «incité» la GRC à éliminer les questions qui semblaient «trop envahissantes», en particulier sur le suicide et les fantasmes sexuels.

Espions et terroristes

Sans surprise, le candidat est interrogé sur son passé et ses antécédents. Pour éviter l'infiltration de ses rangs par des membres du crime organisé, espions et terroristes potentiels, la GRC veut savoir si l'aspirant gendarme a déjà été condamné pour fraude, pour des délits liés aux stupéfiants ou à la pornographie juvénile, pour des actes de violence verbale ou physique. On veut aussi savoir si le candidat a commis l'inceste ou des actes de bestialité, s'il s'est adonné au tourisme sexuel, s'il a des dettes de jeu, a déjà été congédié, a travaillé au noir, etc.

Certaines questions de sécurité visent les espions potentiels. Par exemple: «Votre famille, vos amis ou vous-même êtes-vous entrés en rapport avec des représentants (ambassades, consulats, employés, diplomates, etc.) de gouvernements étrangers, soit au Canada ou à l'étranger au cours des cinq dernières années?»

Toutes les données collectées sont conservées dans un fichier sur «l'habilitation sécuritaire et relative à la fiabilité» et conservées pendant 12 ans.

En janvier, le quotidien Le Soleil a révélé que la police de Québec impose désormais le test du polygraphe à ses candidats pour débusquer notamment les consommateurs de stupéfiants. Le SCRS et la police militaire ont aussi recours au polygraphe.

- Avec la collaboration de William Leclerc