Le Grand Conseil des Cris veut obtenir des «bénéfices tangibles» de la mise en oeuvre du Plan Nord, tout comme cela a été le cas avec la paix des Braves, l'entente intervenue en 2001 pour régler de nombreux différends juridiques entre les Cris et le Québec.

C'est ce qui ressort d'un sommaire de la position défendue par le grand chef des Cris, Matthew Coon Come, à la Table des partenaires du Plan Nord, qui se réunit ce matin à Québec.

«Sans un régime de gouvernance acceptable pour les Cris, il n'y aura pas de Plan Nord dans l'Eeyou Istchee (le nom du territoire cri)», avertit M. Coon Come dans le document obtenu par La Presse.

Selon Abel Bosum, négociateur du Grand Conseil des Cris pour le Québec, la gouvernance acceptable pour les Cris signifie au moins deux choses: l'accès équitable aux fonds publics qui seront consacrés à la mise en oeuvre du Plan Nord et la participation aux projets industriels.

Cela comprend d'éventuels projets hydroélectriques. «On sait qu'Hydro-Québec a encore 3000 ou 4000 mégawatts dans sa ligne de mire et qu'une partie se trouve en Eeyou Istchee, a affirmé M. Bosum à La Presse. On s'attend à ce que le Plan Nord modifie la relation entre Hydro-Québec et les Cris.»

Le Plan Nord se veut un cadre de mise en valeur de la région au nord du 49e parallèle. La Table des partenaires compte une vingtaine de membres provenant de communautés locales, de secteurs industriels et de groupes écologistes. Elle est présidée par la ministre des Ressources naturelles, Nathalie Normandeau.

Les communautés autochtones participent à une autre table qui leur est consacrée, mais certaines communautés innues sont restées à l'écart.

Le territoire cri est nécessairement sur la première ligne de toute exploitation au nord du 49e parallèle. Depuis la construction des barrages hydroélectriques à la Baie-James, la région est accessible par route, ce qui facilite les projets.

Dans le document du Grand Conseil des Cris, M. Coon Come critique le «manque de clarté» entourant «le contenu, la mise en oeuvre et le financement du Plan Nord». Le grand chef laisse clairement entendre que les Cris sont prêts à se battre contre le Plan Nord.

«Tout ce qu'on nous a dit, c'est que le Plan Nord n'est pas un programme mais un processus, affirme-t-il. Le fait qu'il n'y ait pas de consultations complètes en temps opportun placerait les Cris devant un "fait accompli", ce qui serait inacceptable.»

Protection du territoire

En lançant l'idée du Plan Nord, le premier ministre Jean Charest avait affirmé que 50% du territoire serait soustrait à l'exploitation industrielle.

À ce sujet, les Cris estiment que, dans le calcul du territoire à préserver, il faudra tenir compte des secteurs déjà touchés par l'industrie, comme les réservoirs, barrages, lignes à haute tension, routes, mines et exploitation forestière.

Selon M. Bosum, en additionnant tous ces impacts, on s'approche des 50% de territoire touché en Eeyou Istchee. Et le Grand Conseil des Cris affirme qu'il veut faire respecter le critère de 50% de protection. «Nous avons exprimé de façon détaillée au gouvernement notre plan de conservation, dit-il. C'est trop facile de protéger des zones qui ne sont pas accessibles par route.»