Alors que Jean Charest nage en eaux troubles à Québec, son épouse, Michèle Dionne, présente un livre de photographies prises dans des régions secouées du monde. Munie d'un appareil photo que le premier ministre lui a offert pour Noël, la première dame a immortalisé, durant quatre ans, les visages qui ont marqué ses missions humanitaires avec la Croix-Rouge canadienne. Ils sont colligés dans Missions, un ouvrage qui paraîtra le 30 septembre et dont une part des profits servira à financer les activités de l'organisme au Québec.

Derrière chaque grand homme se cache une grande femme, dit le dicton. Pas pour Michèle Dionne, que la majorité des Québécois connaissent sous le surnom de «Michou». «À côté de chaque grand homme», s'empresse de corriger celle qui, après 26 ans dans l'arène politique et plus d'une dizaine de campagnes électorales et de courses à la direction, a décidé de «moderniser» la formule.

Vêtue d'un tailleur élégant, les cheveux bien coiffés, elle parle avec passion de la réalisation de Missions - un projet qui l'a menée de l'Inde à Haïti - mais également de sa vie aux côtés du politicien le plus puissant du Québec. Candide, elle admet que les derniers mois ont été éprouvants.

«Je ne dirai pas que c'est facile. Quand on fait le choix de s'engager en politique, il faut être conscient qu'il y a des hauts et des bas. Sauf que cette fois-ci, c'est particulier. C'est l'intégrité de mon mari qui est touchée. Alors moi, je trouve cela difficile», a-t-elle expliqué lors d'une entrevue réalisée il y a quelques jours dans un hôtel du Vieux-Montréal. «Sauf que la vie continue. On est une famille très liée, il y a une grande complicité entre nous cinq et je pense que ça m'aide beaucoup à traverser des périodes plus difficiles.»

Famille

La famille est au coeur de la vie de Michèle Dionne. Même si ses trois enfants, Amélie, Antoine et Alexandra, sont aujourd'hui des adultes, M. Charest leur parle au téléphone tous les jours. Et les dimanches soir se passent en famille. Leur père a beau avoir été en politique pendant toute leur vie, elle admet qu'il n'est pas toujours évident de composer avec l'oeil du public. «Mais c'est la seule vie que l'on connaît...»

«Je pense qu'avec le temps, ils se font une certaine carapace, mais la sensibilité reste toujours la même. Il ne faut pas penser que ça nous coule sur le dos comme l'eau sur le dos d'un canard. Ça nous touche, ça peut nous blesser souvent, mais il faut maintenir le cap et ne pas se laisser distraire.»

La première dame du Québec prend-elle le temps de consulter les sondages sur la popularité de son époux? Est-ce qu'elle regarde les audiences de la commission Bastarache? «Je dirais que ces temps-ci, mon livre me garde assez occupée. Pour l'instant, c'est la Croix-Rouge.»

La vie familiale et les engagements de M. Charest ont contraint Mme Dionne à abandonner son travail d'orthopédagogue il y a plusieurs années. Mais depuis 11 ans, elle consacre «une très grande partie» de son temps à la Croix-Rouge. Elle est d'ailleurs responsable de la soirée-bénéfice qui amasse le plus d'argent pour l'organisme au Canada. «C'est important, quand on a une vie comme celle-là, d'avoir des choses aussi pour soi. Il faut pouvoir s'épanouir.»

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Après quelques années de bénévolat assidu, le directeur de la Croix-Rouge du Québec l'a invitée, en 2001, à accompagner une délégation humanitaire au Nicaragua et au Honduras. Elle visitera ensuite l'Inde (2006 et 2010), Madagascar (2007), la Chine (2008), le Liberia (2009) et l'Ukraine (2009). Quelques mois après le séisme, elle se rend également à Haïti où elle été témoin des ravages causés par le tremblement de terre.

«Je me disais: il faut que je partage tout cela. Mais il y a des choses que je ne voulais pas montrer. Je ne voulais pas montrer un livre misérabiliste, je voulais montrer l'espoir, donner un visage à cette aide humanitaire. Alors il y a beaucoup de portraits. À l'occasion, on sent une certaine douleur, une certaine tristesse, et d'autres fois on sent une joie malgré tout.»

Mme Dionne affirme que ses missions l'ont aidée à surmonter sa timidité. Elle dit que la confection de Missions lui a fait du bien. «Ces gens-là, on ne les oublie pas. Ce sont des images qui sont imprégnées pour longtemps.»

Leur histoire «nous touche, des fois ça nous blesse», ajoute-t-elle. «On se dit: c'est incroyable ce qu'il leur arrive. Sauf que nous, on est là pour les aider. C'est sûr que les premières fois, j'avais souvent les larmes aux yeux, je me disais: je ne pourrai jamais faire ça, c'est trop difficile. Mais maintenant ça va parce que je me dis que je suis là pour leur apporter du réconfort. Ils doivent sentir qu'on est là pour eux.»

Photo tirée du livre Missions

Depuis 26 ans dans l'arène politique aux côtés de Jean Charest, Michèle Dionne tient aussi à avoir ses propres projets. Depuis 11 ans, elle consacre "une très grande partie" de son temps à la Croix-Rouge.