Il est déjà trop tard pour ramener le formulaire détaillé obligatoire de recensement, affirme le gouvernement fédéral.

C'est ce que soutient le directeur du recensement de 2011, Marc Hamel, dans un document déposé à la Cour fédérale dans le cadre de la requête de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), où elle demande au gouvernement de revenir sur sa décision d'abolir le formulaire détaillé.

«Selon mon avis professionnel, il n'est plus logistiquement possible d'avoir, pour le prochain recensement de mai 2011, l'équivalent de ce qui avait été fait lors de celui de 2006», a-t-il indiqué dans une déclaration sous serment, datée du 25 août.

De plus, les employés de Statistique Canada ont cessé de travailler sur le formulaire détaillé obligatoire en mai 2010, peut-on lire dans sa déclaration sous serment déposée au soutien des prétentions du gouvernement, dont La Presse Canadienne a obtenu copie.

Pourtant, ces modifications au processus du recensement n'ont été rendues publiques que le 26 juin dernier, lors de la publication des questions du recensement dans la Gazette du Canada.

À ce moment, tous les yeux étaient tournés vers les sommets du G8 et du G20 qui se tenaient au pays.

Ainsi, dès le 10 mai, les efforts des employés ont été redirigés vers «la mise en oeuvre de la décision du gouvernement», a indiqué M. Hamel dans sa déclaration.

Le gouvernement conservateur a décidé que pour le recensement de 2011, la nouvelle «Enquête nationale auprès des ménages», un sondage rempli sur une base volontaire, remplacera le formulaire détaillé.

Les formulaires de la nouvelle enquête ont été envoyés chez l'imprimeur le 9 août dernier.

Pourtant, dans sa demande déposée à la fin juillet auprès de la Cour, la FCFA exige spécifiquement une injonction contre le gouvernement pour l'empêcher «d'entreprendre ou de continuer des démarches qui auraient pour effet de rendre plus difficile ou impossible l'utilisation du questionnaire long obligatoire pour le recensement de 2011», lit-on dans la procédure.

Comme engendrer des coûts pour imprimer les formulaires de l'Enquête nationale auprès des ménages et ensuite prétendre qu'imprimer de nouveaux formulaires serait un gaspillage, avait expliqué la présidente de la FCFA, Marie-France Kenny, peu de temps après le dépôt de leur demande.

Mais ces coûts n'ont pas été calculés par le gouvernement.

«Je ne peux pas spéculer sur la quantité de travail qui serait nécessaire pour retourner au plan de recensement original ni sur la possibilité pour les fournisseurs de respecter des nouvelles exigences, parce que cela n'a pas été évalué», indique M. Hamel dans sa déclaration.

Il y détaille par contre toutes les étapes de fabrication du recensement et souligne toutes celles déjà accomplies, ce sur quoi il base son avis qu'il est trop tard pour changer de plan.

Par exemple, la formation des employés qui vont mener le recensement avec l'enquête nationale des ménages a commencé cette semaine, avec l'aide de manuels déjà imprimés ou en voie de l'être.

Selon M. Hamel, des changements supplémentaires au calendrier d'impression feraient en sorte que le recensement ne pourrait plus être tenu en mai 2011 comme prévu.

Et le réaliser plus tard coûterait cher, en plus d'affecter grandement le taux de réponse des citoyens et, par conséquent, la qualité des statistiques.

Il serait toujours possible de modifier la lettre qui accompagne l'Enquête nationale auprès des ménages pour indiquer que celle-ci est obligatoire, comme l'ont suggéré certains.

Mais si le gouvernement attend un jugement sur la requête de la FCFA pour agir, il sera peut-être alors trop tard.

Car dans sa déclaration sous serment, M. Hamel indique que cette lettre doit être finalisée par le gouvernement au plus tard le 30 septembre. «Une fois qu'elle sera envoyée chez l'imprimeur, aucun autre changement ne pourra être fait», souligne-t-il.

Puisque l'audition en Cour fédérale aura lieu le 27 septembre, et que le jugement peut être rendu après cette date, le gouvernement ne disposera que de peu de temps pour ajuster ses flûtes.

La décision du gouvernement d'abolir le formulaire long et obligatoire de recensement a mené à une levée de boucliers de la part de groupes de divers horizons dont des instituts de recherche et de statistiques, des communautés autochtones, des municipalités, des provinces et de nombreux chercheurs et professeurs.

Quant à la FCFA, elle estime que la décision du gouvernement d'abolir le long formulaire contrevient à la loi sur les langues officielles et viole la Charte canadienne des droits et libertés parce qu'il n'y aura plus de données adéquates sur les langues, de façon à desservir adéquatement les communautés francophones.

Depuis l'introduction de leur demande en cour, le gouvernement a ajouté deux questions sur les langues officielles dans le formulaire court obligatoire de recensement. Mais l'organisme considère cette réponse «insuffisante».