L'ancien commissaire de l'organisme de surveillance de la GRC affirme que le nouveau projet de loi ne donnera toujours pas le mordant nécessaire pour enquêter sur des scandales comme l'affaire Maher Arar.

Paul Kennedy a indiqué que la loi sensée moderniser la Commission des plaintes du public contre la GRC laisse au dirigeant de la police montée et au ministre de la Sécurité publique trop d'espace pour s'impliquer au sein d'enquêtes sensibles.

M. Kennedy, qui a été commissaire pendant quatre ans jusqu'en décembre dernier, a déclaré que le projet de loi C-38, déposé en juin ne donnerait au responsable des plaintes qu'un accès limité à l'information qu'il doit consulter.

La commission actuelle est largement vue comme insuffisante car elle n'a pas un accès complet aux fichiers de la GRC et n'a pas le pouvoir d'évaluer ou de vérifier les programmes et les politiques de la force policière.

Le projet de loi présenté par les conservateurs donnerait au commissaire un meilleur accès à l'information de la GRC et augmenterait ses capacités d'investigations, incluant la possibilité de convoquer des témoins, et de réclamer des preuves et des documents.

Ce dernier pourrait également réviser des politiques, diriger des enquêtes avec d'autres organismes de régulation et fournir des rapports aux provinces et aux territoires où la GRC effectue du travail de première ligne.

Pour Paul Kennedy, cependant, le projet de loi est parsemé de lacunes qui pourrait laisser un vérificateur dans le noir. Aux dires de celui qui a également occupé pendant cinq ans le poste de chef-conseil au Service canadien de renseignement de sécurité (SCRS), le modèle à l'étude n'est pas encore l'équivalent du pouvoir détenu par les chiens de garde du SCRA et du Centre de la sécurité des télécommunications Canada, l'agence de surveillance électronique.

«Même s'il s'agit d'une amélioration, cela ne va pas encore assez loin», dit-il.

Le projet de loi verrait l'organisme renommé Commission des plaintes et de vérification de la Gendarmerie royale du Canada, démontrant son rôle nouveau et sensiblement élargi.

Malgré tout, Paul Kennedy ne croit pas que la loi autoriserait le chien de garde de la GRC à fouiller en profondeur dans une affaire comme le cas Arar, qui nécessitait un accès à des dossiers hautement confidentiels.

La loi donnerait le pouvoir au ministre de la Sécurité publique de «déterminer les autorisations» du commissaire pour accéder à des «informations privilégiées» telles que les renseignements confidentiels ou des documents sur des opérations clandestines­. Elle permettrait également au commissaire de la GRC de refuser au vérificateur l'accès à ces documents.

«Je crois que pour être crédible, vous ne pouvez pas avoir un modèle où le commissaire s'installe confortablement et décide s'il va vous laisser vous voir quelque chose ou non, a déclaré M. Kennedy. Ça ne fonctionne tout simplement pas.»

L'ancien commissaire des plaintes du public contre la GRC espère que les députés voteront une version plus musclée de la loi, car il est peu probable que la surveillance de la Gendarmerie royale revienne sous les feux des projecteurs avant une génération.

«On n'en parlera sans doute pas avant encore 20 ans.»