En montant à bord du navire rempli de migrants tamouls arrivé vendredi en Colombie-Britannique, les autorités canadiennes s'attendaient au pire. C'est à leur plus grande surprise, qu'ils ont découvert quelque 450 passagers en bonne santé dont une cinquantaine d'enfants au rire facile.

«En montant à bord, nous avons vu que les gens étaient entassés les uns sur les autres, mais le navire était en bien meilleur état que ce à quoi nous nous attendions, note Rob Johnston, un porte-parole de l'Agence des services frontaliers du Canada. À l'intérieur, c'était propre, bien organisé».

Les premiers à entrer sur le MV Sun Sea ont aussi remarqué que les hommes, les femmes et les enfants étaient hébergés dans différentes partie du bateau, qu'ils avaient été bien nourris et hydratés. Des sacs de riz et de poissons séchés étaient bien en vue.

«Les passagers étaient calmes, se pliaient à nos ordres et étaient en général de bonne humeur», a ajouté M. Johnston, lors d'un point de presse qui a eu lieu sur la base militaire d'Esquimalt, tout près de Victoria, samedi après-midi.

Les quelque 450 passagers ont passé au moins trois mois à l'intérieur du petit navire-cargo bleu et rouge, d'une longueur approximative de 50 mètres. Parti de l'Asie, ils ont fait un détour vers l'Australie avant de mettre le cap sur le Canada.

Des rumeurs circulaient à l'effet qu'un passager était décédé pendant le long voyage et que d'autres étaient atteints de la tuberculose. Conséquemment, les autorités canadiennes avaient préparé une aile de l'hôpital général de Victoria pour accueillir les malades et étaient même prêts à mettre en place une quarantaine.

Sans quarantaine

À l'arrivée du bateau, on a pu voir des agents masqués monter à bord du MV Sun Sea. Sur le quai, des ambulances attendaient des patients potentiels.

En tout, 27 personnes, dont cinq enfants et deux femmes enceintes ont été transportés à l'hôpital pour des problèmes de santé mineure, a exposé le médecin en chef de l'autorité de l'île de Vancouver, Richard Crow.

Six d'entre elles ont été hospitalisées pendant une nuit. «Il n'y a aucun signe de maladie contagieuse. Les patients ont été traités pour des problèmes de nausées, de vomissements et de déshydratation mineure», a précisé M. Crow, en notant qu'aucune arme n'a été trouvée à l'intérieur du bateau.

Première étape franchie

Samedi, l'Agence des services frontaliers a annoncé avoir terminé la première évaluation de 450 passagers, dont environ 350 hommes, 50 femmes et 50 mineurs. En plus d'évaluer leur santé, les autorités ont procédé à une première identification et ont prélevé les empreintes digitales des individus arrivés à bord du MV Sun Sea.

Un nombre indéterminé a été transféré vers des centres de détention de la Colombie-Britannique. D'autres subiront le même sort demain. Les hommes et les femmes seront envoyés vers des centres de détention distincts, a précisé Rob Johnston hier. «Si possible, nous ne diviserons pas les familles», a précisé le représentant de l'agence.

M. Johnston a aussi affirmé hier qu'un groupe de passagers a été confié aux services de la famille de la Colombie-Britannique. Ces derniers seraient des mineurs qui n'étaient pas accompagnés de parents.

Long processus en vue

Dès lundi, la Commission de l'immigration et du statut de réfugiés commencera à se pencher sur le sort des demandeurs d'asile tamouls.

La commission aura notamment la responsabilité de décider si les réfugiés potentiels doivent être gardés en détention.  Le gouvernement peut notamment demander qu'une personne soit détenue si elle pose une menace à la sécurité, si il est impossible de l'identifier ou s'il a des craintes que l'individu en question ne se présente pas lors du processus de détermination du statut de réfugiés. Cette détention est réévaluée périodiquement.

Dans le cas du MV Sun Sea, la GRC rappelait hier qu'elle enquête afin de déterminer si certains des quelque 450 passagers ont participé au trafic de personnes ou s'ils appartiennent à l'Armée de libération de l'eelam tamoul (Tigres tamouls), un groupe séparatiste armé qui figure sur la liste canadienne des organisations terroristes. «Nous sommes au tout début de l'enquête. Nous essayons de comprendre qui jouait quel rôle sur le bateau», a dit hier une inpecteure de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), Tracey Rook.

Les Tamouls se mobilisent

Alors que le processus d'identification et d'évaluation se poursuit, la diaspora tamoule de Vancouver se prépare à venir en aide aux demandeurs d'asile. Le Congrès tamoul du Canada soutient que les migrants à bord du MV Sun Sea ont fui la persécution et des conditions de vie difficiles au Sri Lanka, où la minorité tamoule est en constante confrontation avec la majorité cinghalaise. Une bonne partie du nord-est du pays a été ravagée par une guerre civile de 25 ans qui a pris fin en mai 2009 lorsque les Tigres tamouls ont été défaits par l'armée sri lankaise.