À 21 ans, un jeune Tamoul a risqué sa vie pour venir au Canada à bord de l'Ocean Lady, un navire arrivé en Colombie-Britannique l'automne dernier. Sans révéler son nom, il a accepté de partager son expérience.

Au téléphone, le débit est rapide, la voix incertaine. Le jeune Tamoul explique comment, à la fin de la guerre civile, il a vécu dans un camp, avec 300 000 personnes. «Je me suis échappé. J'ai quitté mon pays pour sauver ma vie», dit-il, par traducteur interposé.

Seul, il rejoint le navire Ocean Lady, où, en tout, 76 Tamouls embarquent. C'est la première fois qu'il prend la mer. Le voyage durera plus de 40 jours. «J'ai été malade durant tout le voyage, se souvient-il. Je dormais dans la cale, il n'y avait rien d'autre à faire qu'attendre.»

L'angoisse a été sa compagne de route. «La mer était instable, il y avait des tempêtes. J'étais sûr que quelque chose de terrible allait arriver. J'avais peur que ma famille ne retrouve jamais mon corps», raconte-t-il.

Le navire a atteint les côtes de la Colombie-Britannique en octobre dernier. Ses passagers ont tous été autorisés à rester au Canada en attendant d'obtenir l'asile. De nouvelles difficultés attendaient toutefois le jeune homme, que les autorités ont interrogé à plusieurs reprises avant de le placer en détention durant cinq mois.

Une fois libéré, le jeune Tamoul a décidé de s'installer à Toronto. En attente d'une réponse à sa demande d'asile, il n'a pas le droit de travailler. «Je vais à l'école pour apprendre l'anglais, je vis d'aide sociale», dit celui qui rêve de reprendre des études en informatique.

Sa vie, le jeune homme la voit au Canada. «Mon père est mort, mais ma mère, mes frères et mes soeurs sont toujours dans un camp. Je ne pense pas encore à les faire venir, car ma vie ici est un point d'interrogation», affirme-t-il.

Au moment où près de 500 réfugiés tamouls accostent au Canada à bord du MV Sun Sea, le jeune homme tient à souligner les conditions dans lesquelles ils arrivent: «Les personnes qui viennent ici sont vraiment affaiblies. J'espère que le gouvernement canadien fera avec elles ce qu'il a fait avec nous, qu'il les laissera entrer et attendre ici. Si ces gens ont quitté le Sri Lanka, c'est vraiment parce qu'ils n'avaient aucune sécurité.»