Les villes et les organismes qui mettent au point des services sociaux pour les Canadiens affirment avoir été complètement pris de court par la décision du gouvernement fédéral de remplacer le formulaire détaillé de recensement obligatoire par une enquête à participation volontaire.

La Fédération canadienne des municipalités, le Conseil canadien de développement social et d'autres regroupements se servent des données du recensement pour décider comment et où il faut dépenser les deniers publics.

Le gouvernement conservateur a décidé de procéder à ce changement à compter de 2011. Le recensement demeurera donc obligatoire pour tous les foyers, qui recevront tous un questionnaire court. Mais le formulaire long et détaillé deviendra à participation volontaire.

Celui-ci sera acheminé à davantage de foyers, mais les observateurs craignent que les informations amassées soient moins fiables. C'est le cas de l'ancien statisticien en chef de Statistique Canada, Ivan Fellegi, qui juge que de faire parvenir plus d'enquêtes ne réglera en rien le problème.

«Le problème, c'est que sur une base volontaire, ceux qui répondent, ce sont ceux qui ont envie de répondre», a-t-il dit, ajoutant que les groupes vulnérables risquent moins de s'atteler à cette tâche. Ainsi, selon lui, les données concernant les groupes d'immigrants récemment arrivés au pays ou encore les moins bien nantis seront plus difficiles à obtenir.

Le ministre de l'Industrie, Tony Clement, a expliqué que les changements avaient été effectués en réponse aux plaintes reçues concernant le caractère coercitif du long formulaire.

Il a affirmé que des députés lui avaient rapporté que plusieurs citoyens n'avaient pas apprécié recevoir des menaces d'amendes ou d'emprisonnement s'ils ne complétaient pas le formulaire.

Aucun changement ne sera effectué à la version courte et obligatoire du formulaire, qui comprend des questions de base sur l'âge et le sexe des personnes habitant un foyer. Mais environ un tiers des Canadiens - comparativement à un cinquième selon l'ancienne formule - recevront un formulaire les questionnant notamment au sujet de leurs revenus, leurs niveaux d'éducation ainsi que leurs origines ethniques.

Les coûts de ce changement pourraient atteindre jusqu'à 30 millions $, selon Statistique Canada.

M. Clement a par ailleurs indiqué qu'une campagne d'information serait lancée afin d'encourager les Canadiens à faire leurs devoirs et à remplir les formulaires.

Le ministre a également balayé du revers de la main l'accusation, provenant de certains employés au sein de Statistique Canada et de l'opposition, selon laquelle le gouvernement conservateur tentait de sabrer dans le travail d'analyse effectué par l'agence. En entrevue à La Presse Canadienne, il a cependant admis qu'il n'avait pas mené de consultation avant de prendre sa décision.

Le gestionnaire intérimaire de la division chargée de l'analyse et de la recherche sociale à la ville de Toronto, Harvey Low, estime que les données de Statistique Canada sont les seules au pays qui fournissent des informations fiables au sujet des citoyens et de leurs voisinages.

De plus, M. Low soutient qu'en changeant la méthode de cueillette, cela a un impact sur les chiffres. Conséquemment, il croit qu'il deviendra difficile de comparer les données au fil du temps.