Investissement Québec n'a pas vérifié elle-même la santé de BCIA avant de lui garantir un prêt de 1,3 million de dollars. De plus, il appert que l'agence gouvernementale a fait preuve de «flexibilité» pour aider la firme de sécurité, l'automne dernier.

Interrogé en commission parlementaire, jeudi soir, le président d'Investissement Québec, Jacques Daoust, a admis avoir laissé l'analyse financière du dossier entre les mains du prêteur de BCIA, soit le Mouvement Desjardins.

 

«On parlait de 1,3 million garanti sur un prêt de 2 millions (...). Ce sont toutes des données qui sont faites par le Mouvement Desjardins. Le Mouvement Desjardins, vous savez, c'est notre principal partenaire au Québec. On lui fait confiance», a déclaré M. Daoust.

La firme de sécurité BCIA, propriété de Luigi Coretti, a reçu ce prêt de 2 millions de Desjardins en novembre 2009. Quatre mois plus tard, BCIA a commencé à faire des chèques sans provision. Le 23 avril, elle s'est placée sous la protection de la Loi sur la faillite.

Dans les années précédentes, la firme avait reçu 4 millions par l'entremise des Fonds d'intervention économique régionaux (FIER), eux aussi gérés par Investissement Québec. L'automne dernier, elle a eu recours au programme Renfort d'Investissement Québec pour faire garantir un nouveau prêt de Desjardins.

Le programme Renfort a été lancé dans la foulée de la crise financière de l'automne 2008. Il est destiné à aider les entreprises en bonne santé à surmonter la crise. Pour être admissible, l'entreprise doit avoir cumulé des fonds positifs au cours des trois dernières années et démontrer des perspectives de rentabilité.

Des «exceptions»

Le député Jean-Martin Aussant, critique du PQ en matière de développement économique, a affirmé à la commission parlementaire que les critères n'avaient manifestement pas été respectés, puisque Desjardins a coupé les vivres à l'entreprise, quelques mois plus tard.

Questionné à ce sujet, Jacques Daoust a répondu qu'il y a des «exceptions» et que les critères doivent être respectés de façon générale. «On a une certaine flexibilité à l'intérieur du programme, une certaine discrétion. Il a été mis en place après qu'on a eu reçu un certain nombre de dossiers qui méritaient qu'on les aide. Et on en a aidé beaucoup de cette façon-là», a expliqué M. Daoust.

Le ministre du Développement économique, Clément Gignac, a ajouté que les critères doivent être «idéalement» et «généralement» respectés. «Oui, il y a des règles», mais il faut juger au cas par cas, a dit M. Gignac. «À l'époque, on estimait que le plan d'affaires de cette entreprise de transport de valeurs et de sécurité ne comportait pas un risque indu.»

Au Mouvement Desjardins, qui a fait l'analyse du risque, on ne peut expliquer la descente aux enfers si rapide de BCIA. «Ça fait partie des questions qu'on se pose», a dit le porte-parole, André Chapleau.

Selon la porte-parole d'Investissement Québec, Josée Béland, BCIA était en pleine santé en novembre et ses contrats étaient de qualité. Notamment, 80% des clients de BCIA étaient des institutions, a-t-elle dit. Le fait que 1000 employés étaient en jeu a eu une influence.

La Caisse centrale Desjardins a accordé une marge de crédit à BCIA au printemps 2008. Cette marge atteint maintenant 6,5 millions. Au printemps 2009, c'est le fonds Capital régional et coopératif Desjardins qui a, cette fois, injecté 4 millions dans l'entreprise. C'est donc 12,5 millions que le Mouvement Desjardins a injectés dans l'entreprise en deux ans, si l'on compte le prêt de novembre dernier.