Au moment où le gouvernement du Québec a pris une position ferme dans le dossier d'une étudiante égyptienne, expulsée d'une classe de francisation parce qu'elle tenait à garder son niqab en classe et ce deux fois plutôt qu'une, d'autres provinces canadiennes semblent peu enclines à légiférer en cette matière.

Des responsables du ministère de l'Immigration du Québec ont exclu une musulmane d'un cours de français subventionné par le gouvernement, au cours des derniers jours, après qu'elle ait refusé de retirer son niqab, un voile couvrant la totalité du visage, sauf les yeux.

Il s'agissait de la deuxième confrontation du genre entre Québec et l'étudiante, ce qui a poussé la ministre de l'Immigration, Yolande James, à y aller de la déclaration suivante : «Si la personne veut assister au cours de français... on veut voir son visage.»

Mais cette prise de position ne semble pas commune ailleurs au Canada.

Par exemple, les autorités de l'Ontario permettent aux musulmanes qui y tiennent à garder leur visage couvert en classe.

«L'Ontario est une province ouverte, a déclaré Indira Naidoo-Harris, une porte-parole du ministère des Affaires civiques et de l'Immigration. Nous sommes déterminés à créer une société ouverte où tous les Ontariens sont respectés.»

Mais cette ouverture, dans les faits, n'a pas été véritablement testée car, selon Mme Naidoo-Harris, l'Ontario n'a jamais été confrontée à un cas du genre.

La situation est semblable en Colombie-Britannique qui, à l'instar de bien d'autres provinces, ne compte aucune politique clairement établie sur cette question lors de cours linguistiques subventionnés par le gouvernement.

«En Nouvelle-Écosse, les citoyens ont le droit d'exprimer leur foi comme bon leur semble», a indiqué, de son côté, la ministre de l'Immigration, Ramona Jennex.

Mais au Québec, les questions relatives à la tenue vestimentaire ont des répercussions politiques et sont partie inhérente du débat sur les fameux accommodements raisonnables. Ce thème est devenu si controversé que le gouvernement libéral a dû instaurer une commission publique pour débattre de la question, en 2007.

La plupart des recommandations qui en sont issues ont été reléguées aux tablettes, mais depuis la plus récente controverse, le premier ministre Jean Charest a dû répondre à un barrage de questions sur la volonté de son gouvernement à préserver les valeurs du Québec.

«Le dossier des accommodements raisonnables est plus délicat au Québec à cause de son passé en tant que majorité francophone qui, à la fois, se veut une minorité vulnérable», fait remarquer Monton Weinfeld, professeur de sociologie et spécialiste de l'antisémitisme et des relations interethniques à l'Université McGill.

«Les questions d'intégrité culturelle et de survie sont au coeur des préoccupations.»

Le fait que le Québec soit moins diversifié, sur le plan ethnique, que d'autres régions du pays pourrait aussi expliquer pourquoi ce dossier y retient tant l'attention.

Selon le plus récent bilan de Statistique Canada, seulement 16% de la population de Montréal n'étaient pas de race blanche, en 2006. Les chiffres étaient encore plus bas à Québec (2%) et à Saguenay (1%). À Vancouver et à Toronto, en comparaison, la proportion de gens de couleur était supérieure à 40%.

«Le dossier du port du niqab fait beaucoup jaser parce qu'il est rattaché à l'islamophobie, note M. Weinfeld. Mais ce n'est pas quelque chose exclusif au Québec.»

Plusieurs représentants d'autres provinces n'ont pas voulu commenter la position prônée par Mme James, mais les responsables au Manitoba disent surveiller la situation là-bas.