Le président de la FTQ, Michel Arsenault, condamne tout «taxage» ou geste d'intimidation sur les chantiers de construction, mais ne voit pas la nécessité de modifier le système de placement des ouvriers sur les chantiers.

Et la seconde organisation syndicale dans la construction au Québec, le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (26% des ouvriers), pourtant principale rivale de la FTQ (43% des ouvriers), défend elle aussi le système de placement et dénonce tout autant les gestes d'intimidation.

En entrevue vendredi, le président de la plus importante centrale syndicale du Québec, la FTQ, a assuré qu'il réprouvait tout geste d'intimidation ou de menaces, comme ce qui a été rapporté par certains médias.

«La FTQ et la FTQ-Construction, on condamne les techniques de taxage, d'intimidation, a dit M. Arsenault. On n'approuvera pas ça. Par contre, il faut absolument qu'il y ait des enquêtes faites et que, s'il y a quelque chose, on porte des accusations. Et les gens qui sont accusés, ils ont le droit à une défense pleine et entière. On ne peut pas accuser du monde, dans une société comme le Québec, avec des témoignages de gens voilés ou cagoulés.»

Placement

Par ailleurs, M. Arsenault ne croit pas que le système de placement des ouvriers par les syndicats doive être aboli ou changé. Selon lui, c'est ce qui permet aux ouvriers d'avoir un nombre suffisant d'heures sur les chantiers et de développer des compétences plus poussées.

«Sur le placement, partout en Amérique du Nord, dans la construction, ce sont les syndicats de la construction qui font le placement. Si on regarde dans l'ensemble du Québec, un employeur qui veut employer ses propres employés, il a le droit aussi. Il y a 11%, seulement, des employés au Québec qui sont placés par les syndicats. Les autres, ce sont les employeurs qui choisissent», a affirmé M. Arsenault.

Le principal rival de la FTQ-Construction, le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international), défend d'ailleurs ce même système de placement.

Dans une lettre ouverte, son directeur général, Donald Fortin, affirme qu'«employeurs et travailleurs y trouvent leur compte, car ce service répond à un réel besoin dans notre industrie».

«Contrairement aux affirmations de nos détracteurs, ce système de recrutement permet aux employeurs d'augmenter leur productivité en accédant rapidement à une main-d'oeuvre spécialisée et compétente sans avoir à maintenir un important service de resssources humaines. Lors de demandes spécifiques pour un travail spécialisé, qui mieux que le syndicat du métier ou de l'occupation concerné pour aider un entrepreneur à trouver la personne qui possède réellement les connaissances et compétences particulières requises pour répondre à ses besoins?» demande M. Fortin.

Il ajoute que «ce travail de référence doit cependant être fait correctement» et en respectant un code d'éthique.

Côte-Nord

Pour ce qui est des chantiers de la Côte-Nord, M. Arsenault soutient que la situation est particulière.

Il explique que si ce sont principalement des ouvriers de la FTQ-Construction qui y travaillent, c'est que la convention prévoit que ces gros employeurs qui viennent de l'extérieur doivent privilégier la main-d'oeuvre locale. Or, c'est la FTQ-Construction qui représente la grande majorité des ouvriers dans cette région.

«C'est important pour une économie régionale que quand il y a un mégaprojet de construction, ce soit les gens de la région qui aient la priorité. Sur la Côte-Nord, la convention collective marche par bassins régionaux. Et moi je trouve tout à fait légitime, correct, que quand il y a de grands chantiers sur la Côte-Nord, ce soit les travailleurs de la construction de la Côte-Nord qui aient priorité et que le travail aille à eux. Ce sont des gens qui font vivre la Côte-Nord, qui paient des taxes sur la Côte-Nord, leurs enfants étudient sur la Côte-Nord», a martelé M. Arsenault.

Il rappelle aussi que la FTQ-Construction, avec ses 70 000 membres, représente de larges majorités d'ouvriers dans certains métiers comme les électriciens (99%), les charpentiers-menuisiers (89%), les opérateurs (75%) et les journaliers (68%).

M. Arsenault souligne aussi que si les ouvriers étaient si insatisfaits de la FTQ-Construction ou s'il y avait eu autant de gestes répréhensibles que certains le laissent croire, la FTQ-Construction aurait perdu davantage de membres lors de la dernière période de changement d'allégeance syndicale, en juin dernier.

Lors de ce scrutin organisé par la Commission de la construction du Québec, la FTQ est passée d'un taux de représentation de 44% en 2006 à 43% en 2009, malgré la mauvaise presse dont elle avait été l'objet.