Bien au fait de ce que vivent les militaires canadiens sur les routes et dans les villages d'Afghanistan, le gouvernement fédéral perd leur trace lorsqu'ils se retrouvent... à la rue, dans une grande ville canadienne.

C'est pourquoi le ministère des Anciens combattants a lancé hier une campagne visant à identifier, retrouver et aider ceux qui seraient devenus sans-abri.

Premier champ de bataille: les rues de Montréal. Mais ce n'est qu'une question de semaines avant que l'initiative ne s'étende à d'autres grandes villes du pays où l'on signale à l'occasion la présence de vétérans dans des refuges.

En conférence de presse hier matin au café L'Itinéraire, à l'ombre du pont Jacques-Cartier, le ministre des Anciens combattants, Greg Thompson, a admis que le phénomène est mal connu. Pressé de questions, il a reconnu que son ministère était incapable, pour le moment, d'évaluer le nombre d'anciens soldats qui se retrouvent dans une telle situation.

«Plusieurs ont des problèmes de santé mentale, d'alcool ou de drogue.

Alors, c'est très difficile de les recenser, et c'est pourquoi nous lançons cette campagne. Si nous avions les chiffres, nous ne serions pas ici», a-t-il assuré.

Chose certaine, «le nombre est très petit par rapport à notre voisin, les États-Unis, où le problème est gigantesque», a ajouté le ministre.

Les Anciens combattants travailleront avec les organismes montréalais qui viennent en aide quotidiennement aux sans-abri, afin de recenser cette clientèle particulière. «On nous a donné de bons outils pour aider à leur identification. On va maintenant rester aux aguets», a témoigné France Desjardins, directrice générale de la Maison du Père.

«Je crois que nous sommes les mieux placés pour identifier ces individus», a de son côté déclaré Serge Lareau, directeur général de L'Itinéraire. Selon lui, quelque 25 000 personnes de tous les horizons sont sans-abri à Montréal.

Lorsque des anciens combattants seront identifiés, ils pourront, s'ils le désirent, être référés au Ministère afin de bénéficier des programmes qui leur sont destinés.

«Cela peut être des programmes de soins de santé, d'aide à la famille, de santé mentale, de réinsertion à la vie civile, a souligné Alain Gaudreault, directeur régional des communications du ministère. Le but premier du projet est de manifester notre présence.» Deux organismes, le Syndicat des travailleurs canadiens de l'automobile et Wounded Warriors, participent financièrement à la campagne.

Aux États-Unis, comme l'a signalé M. Thompson, le problème est immense.

Selon diverses évaluations, entre 50 000 et 200 000 sans-abri sont d'anciens combattants, dont plusieurs de la guerre du Vietnam.

Au Canada, le phénomène est plus récent. Certes, on croit que plusieurs sans-abri reviendraient d'Afghanistan, mais d'autres auraient participé à des missions antérieures comme Casques bleus.

Présent à la rencontre d'hier, l'ombudsman du ministère des Anciens combattants, le colonel à la retraite Pat Strogan, a signalé ce problème au cours des deux dernières années. Il a signé un rapport sur le sujet et a interpellé plusieurs fois le ministre afin que plus d'actions soient entreprises.