Avant de signer une entente de coopération, le Canada devrait exiger que l'Inde ratifie le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, estiment le Bloc québécois et le NPD.

En visite en Inde, le premier ministre Stephen Harper a ouvert la porte, hier, à la signature éventuelle d'un traité avec le géant sud-asiatique. Mais vu le passé trouble de ce pays dans le dossier du nucléaire, l'opposition appelle Ottawa à la prudence.«Je pense qu'il faut d'abord qu'il y ait une signature du traité sur la non-prolifération. On ne devrait pas faire affaire avec des pays qui refusent de signer ce traité, a dit le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe. Sinon, ça démontre toute l'hypocrisie du discours canadien, de dire qu'il ne faut pas qu'il y ait prolifération des armes nucléaires mais que, si on fait de l'argent avec cela, ce n'est pas important.»

En 1974, l'Inde avait détourné du matériel nucléaire provenant d'un réacteur fabriqué au Canada, voué à des fins civiles, pour en faire une arme nucléaire. Pendant plus de deux décennies, l'incident avait créé un froid entre les deux pays sur la question nucléaire.

Mais aujourd'hui, Ottawa considère que l'Inde représente un marché intéressant pour les technologies mises au point par une industrie florissante au Canada.

«L'Inde est maintenant une démocratie responsable qui partage les valeurs de liberté et l'État de droit», a déclaré le ministre d'État aux Affaires étrangères, Peter Kent. Il a ajouté que le gouvernement indien avait pris des engagements considérables en matière de désarmement et de non-prolifération dans les dernières années.

Mais pour le NPD, le seul fait que l'Inde refuse de ratifier le traité, en vigueur depuis 1970, est un motif suffisant pour douter de ses motivations.

«C'est précisément parce que l'Inde n'a aucune intention de respecter le droit international qu'elle refuse de signer le traité, et le Canada devrait arrêter d'être dupe, a affirmé le député néo-démocrate Thomas Mulcair. Il faut vraiment être naïf ou de mauvaise foi pour continuer à fournir du matériel nucléaire à l'Inde alors qu'elle n'a jamais respecté les accords et le droit international par le passé.»

Selon M. Duceppe, le Canada perdra aussi son rapport de force face à l'Iran en acceptant de faire affaire avec un pays qui refuse de signer le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.

Plus nuancé, le critique libéral en matière d'affaires étrangères, Bob Rae, estime que l'Inde devra garantir que la technologie canadienne ne sera pas utilisée à des fins autres que civiles. «Si nous pouvons trouver des assurances sur la question de l'utilisation pacifique de cette technologie, nous sommes en faveur des négociations», a-t-il dit.

Le Canada, dit-il, ne peut pas se passer d'une entente avec l'Inde, tant le potentiel d'une telle coopération est grand, notamment dans la lutte contre les changements climatiques par l'utilisation d'énergies moins polluantes.