La Commission des droits de la personne n'a pas fait que recommander à la Société de l'assurance automobile de se plier aux demandes de ses clients qui souhaitent être évalués par une personne de leur sexe à l'examen pratique de conduite. Depuis un an, divers employeurs se sont adressés au service-conseil de la Commission pour savoir comment réagir à des demandes d'accommodements. La Presse a demandé à être informée des recommandations formulées jusqu'ici en privé.

Un enseignant musulman du secondaire demande à ne jamais travailler le vendredi parce qu'il doit aller prier à la mosquée. Sa commission scolaire doit-elle l'accommoder? Oui, estime la Commission des droits de la personne.

 

Ce cas n'est pas théorique. C'est une demande qui a bel et bien été formulée et à laquelle la commission scolaire ne savait que répondre. La Commission des droits de la personne a estimé que l'enseignant devrait, dans un premier temps, utiliser ses congés; puis, quand il les aura épuisés, il devrait être autorisé à s'absenter sans solde.

Comme les horaires des élèves du secondaire ne sont souvent pas établis sur des calendriers fixes de cinq jours, mais qu'ils courent sur sept, huit ou neuf jours, les cours donnés par cet enseignant ne tombent pas toujours le vendredi. Dans le cas présent, a calculé la Commission des droits de la personne, cela pourrait signifier que les élèves auraient un suppléant six ou sept vendredis par an.

Comme le précise Jean-Sébastien Imbeault, conseiller en matière d'accommodements raisonnables à la Commission des droits de la personne, cette opinion donnée par la Commission n'est ni un avis juridique ni une opinion coulée dans le béton. «Ce n'est pas non plus un droit donné à vie: on l'accorde tant que la contrainte n'est pas excessive», a-t-il dit.

Cela peut donc vouloir dire que la Commission, qui aurait recommandé d'accommoder quelqu'un, suggère ensuite que le privilège lui soit retiré si beaucoup de personnes formulaient la même demande et que la chose devenait impossible à gérer - pour un hôpital ou une commission scolaire, par exemple.

Si un employeur se croit contraint de donner congé tous les vendredis à un adepte d'une religion donnée, ne risque-t-il pas de s'assurer dans l'avenir de ne surtout pas embaucher une personne de la même religion?

Jean-Sébastien Imbeault admet que «ça peut être là un effet pervers de l'accommodement raisonnable». Cela dit, cette réaction d'un employeur serait un bien gros raccourci «étant donné que deux personnes d'une même confession n'auront pas le même type de demande».

De la même façon que certains catholiques vont à la messe le dimanche, plusieurs autres ne fréquentent pas l'église depuis belle lurette. C'est la même chose dans les autres religions.

En un an, le service-conseil de la Commission des droits de la personne a reçu 58 demandes d'accommodements; 66% d'entre elles ont trait à des demandes religieuses, et les autres sont liées à un handicap, à l'orientation sexuelle, à des convictions politiques, à la langue ou à des mesures inclusives.

Les opinions de la Commission sont basées sur la jurisprudence, sur la Charte des droits et libertés et sur les avis passés émis par la Commission.

Les questions soumises par les employeurs sont étudiées par trois personnes à la Commission: une conseillère juridique et deux conseillers en matière d'accommodement raisonnable (l'un ayant une formation en sociologie et l'autre en éducation et en psychologie).

L'opinion émise par la Commission n'exclut pas qu'une personne puisse déposer en parallèle une plainte auprès de la même Commission. Si la preuve de discrimination est suffisante, la Commission peut présenter le cas au Tribunal des droits de la personne.

Entre 2000 et 2006, la grande majorité des plaintes présentées à la Commission des droits de la personne émanaient d'adventistes et de protestants de très stricte obédience, précise Marc-André Dowd, vice-président de la Commission des droits de la personne.

Depuis un an, le service-conseil de la Commission a reçu 24 demandes liées à l'islam, 10 reliées au judaïsme, quatre reliées au sikhisme, 2 à l'hindouisme, et 2 aux témoins de Jéhovah.