L'ancien diplomate canadien Robert Fowler, enlevé par Al-Qaeda et retenu en otage pendant plus de quatre mois au Niger, croit que ses ravisseurs ont un informateur à l'ONU ou au gouvernement nigérien.

«Je sais que quelqu'un m'a vendu», a-t-il déclaré lors d'une entrevue diffusée hier soir au réseau CBC, la première qu'il accorde depuis sa libération, en avril.

Robert Fowler, son assistant Louis Guay et leur chauffeur ont été enlevés en décembre dans l'ouest du Niger. Ils retournaient à la capitale, Niamey, après avoir visité une mine d'or exploitée par une entreprise canadienne.

Les trois hommes ont été enlevés sur l'autoroute, dans un coin que l'ONU considère pourtant comme sûr, selon M. Fowler.

Le rapt a été d'abord revendiqué par des groupes rebelles, puis par l'organisation «Al-Qaeda au Maghreb islamique».

Robert Fowler croit que ses ravisseurs ont été prévenus de ses déplacements. Le personnel de l'ONU et le gouvernement du Niger, qui était chargé d'assurer sa sécurité, connaissaient son itinéraire de voyage, dit-il.

«De qui pourrait-il s'agir? a-t-il demandé. Ce pourrait être le gouvernement du Niger. Ce pourrait être un sympathisant d'Al-Qaeda au bureau de l'ONU au Niger, au bureau de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest ou à la tour du secrétariat à New York.»

Un porte-parole des Nations unies s'est distancié des spéculations de Robert Fowler, répliquant que, à ce stade-ci, rien ne laisse croire à une fuite du côté de l'ONU.

«Nous n'avons aucune information solide qui nous permettrait de mener une enquête interne», a dit à La Presse Farhan Haq, soulignant que M. Fowler n'émet que des hypothèses dans l'entrevue qu'il a accordée à l'émission The National. La deuxième partie sera diffusée ce soir.

«Mais c'est certainement une source de préoccupation pour nous, a ajouté M. Haq. Nous aimerions recevoir toute information pertinente en lien avec cela.»

Selon Robert Fowler, sa présence irritait les autorités nigériennes, qui «haïssaient» sa mission.

Le président Mamdou Tandja semblait «offensé, ennuyé et embarrassé» par la décision de l'ONU d'envoyer un émissaire dans son pays. Le Canadien était chargé d'aider le gouvernement à faire la paix avec les rebelles touaregs du nord du pays, qui exigent une plus grande part des revenus d'extraction de l'uranium.

Autre indice qui laisse croire à l'implication d'un informateur: les membres du groupe qui le séquestraient - une vingtaine d'hommes et d'enfants - semblaient savoir qui il était, a ajouté M. Fowler. Ils n'étaient «pas surpris» quand l'ex-diplomate leur a confirmé son identité.

Une captivité de 130 jours

Robert Fowler a cru qu'il ne sortirait pas vivant de sa captivité de 130 jours.

Il se souvient qu'une camionnette leur a barré la route et que deux hommes à bord les ont visés avec leurs AK-47. À l'intérieur du camion, les trois otages ont été couverts d'une «couverture huileuse et malodorante», et deux hommes se sont assis sur eux pour les maintenir en place.

Le voyage qui les a menés dans un camp au nord du Mali a duré 56 heures. Robert Fowler s'est fracturé une vertèbre, tandis que Louis Guay a été frappé au visage avec un fusil.

Les ravisseurs ont forcé M. Fowler à enregistrer quatre vidéos, bien qu'aucune n'ait été rendue publique. Dans l'une d'elles, on lui avait bandé les yeux et attaché les mains dans le dos, tandis que l'un de ses bourreaux parlait lentement en arabe en faisant référence au djihad et à Al-Qaeda.

L'ex-diplomate canadien devait également assister à des «soirées vidéo» au cours desquelles ses ravisseurs se rassemblaient autour d'un ordinateur pour regarder des soldats de la coalition se faire abattre en Irak et en Afghanistan.

Joint par courriel par La Presse, Robert Fowler a signifié qu'il n'accorderait plus d'entrevue jusqu'à nouvel ordre.