La Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire a demandé au tribunal de forcer le gouvernement conservateur à déposer des documents relatifs aux prisonniers afghans remis par les militaires canadiens aux autorités locales, et a assigné à comparaître des hauts fonctionnaires et des anciens officiers pour faire la lumière dans ce dossier.

La commission tente ainsi de surmonter les obstacles qui l'empêchent d'avancer dans son enquête relativement aux allégations datant de 2007 et selon lesquelles des policiers militaires canadiens ont transféré des détenus aux autorités afghanes en dépit des faits leur indiquant que ces prisonniers pourraient subir la torture.

Selon le chef de cabinet de la commission, Sylvain Roy, la demande d'injonction en Cour fédérale concerne des documents qui ont déjà été soumis à l'enquête mais qui avaient été lourdement censurés.

M. Roy a ajouté en entrevue à La Presse Canadienne que la commission n'arrivait pas à obtenir les informations nécessaires pour remplir son mandat, qui est de mener une enquête ouverte et transparente. La commission a finalement décidé d'exercer ses pouvoirs en vertu de la Loi sur la défense nationale.

En plus de réclamer ces documents, la commission a assigné à comparaître quatre ex-commandants des troupes canadiennes à Kandahar, le sous-ministre des Affaires étrangères et quatre hauts fonctionnaires, ainsi que le directeur des Services correctionnels du Canada.

M. Roy a cependant refusé de préciser lesquelles de ces assignations étaient destinées au dévoilement des documents et celles qui obligeront des hauts fonctionnaires à comparaître à titre de témoin aux audiences publiques prévues par la commission. Il a toutefois indiqué que la commission comptait sur la «coopération des parties» visées.

Des avocats du gouvernement fédéral ont tenté d'empêcher les responsables de la commission de tenir des audiences publiques au sujet de la plainte déposée en 2007 par Amnistie internationale et l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique.

Ces deux organismes ont déjà intenté des poursuites judiciaires à l'encontre d'Ottawa et elles n'ont pas obtenu gain de cause. Elles plaidaient que la Charte canadienne des droits et libertés s'applique aux gestes posés par les soldats canadiens à l'étranger. Mais le tribunal a décidé que ces enjeux relevaient plutôt du droit international.

Pour empêcher la tenue d'une enquête de la commission, le gouvernement fédéral avait plaidé que le transfert de prisonniers n'était «pas sujet» au processus d'examen des plaintes concernant la police militaire. Ottawa affirmait aussi que la Loi sur la défense nationale accorde seulement à l'agence le pouvoir d'enquêter sur des plaintes déposées contre la police militaire.

Une autre audience de la Cour fédérale visant à clarifier la juridiction de la commission devrait débuter le 5 octobre. Elle devrait s'étendre sur six semaines.

L'avocat des groupes de défense des droits de la personne, Paul Champ, croit que les représentants du gouvernement attendront l'issue de cette audience avant de décider s'ils collaboreront ou non avec la commission.