Une véritable campagne électorale se déroule tout au long du mois de mai, partout au Québec: la campagne de maraudage dans l'industrie de la construction, un phénomène qui ne se produit qu'une fois aux trois ans.

Quelque 143 000 ouvriers - un sommet depuis 1974 - seront ainsi courtisés par les cinq organisations syndicales de la construction.

La présente campagne de maraudage et le vote qui s'ensuivra les 4, 5 et 6 juin, revêtent un intérêt particulier, cette année, à cause des difficultés qu'a connues la FTQ-Construction.

La FTQ-Construction reste le plus imposant syndicat de la construction, représentant 44 pour cent des ouvriers, selon les données du maraudage de 2006. Le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (international) suit avec 27 pour cent des ouvriers. Les trois autres sont la CSD-Construction (14 pour cent), la CSN-Construction (11 pour cent) et le Syndicat québécois de la construction (4,5 pour cent).

Ce régime de relations de travail dans la construction, avec cinq syndicats qui entrent en compétition tous les trois ans, est unique en Amérique du Nord, souligne en entrevue André Martin, de la Commission de la construction du Québec.

Ce système particulier veut qu'au moment du vote, seuls les ouvriers qui veulent changer d'allégeance syndicale se déplacent pour aller voter. Autrement, ils sont présumés vouloir garder le même syndicat.

Habituellement, ce sont «à peu près 8000» ouvriers qui se déplacent pour exercer leur droit de vote, indique M. Martin.

Cette fois, la Commission de la construction se prépare à recevoir plus de visite dans ses 100 bureaux de scrutin. «On n'appréhende pas nécessairement plus corsé. On n'appréhende pas. On prévoit une organisation qui va faire en sorte qu'on sera capable d'accueillir plus de gens qui veulent voter», corrige M. Martin.

Est-ce à cause des déboires qu'a connus la FTQ-Construction? «On se prépare au cas où. On n'a pas les yeux fermés. On n'a pas les oreilles fermées. Ce n'est pas une analyse fine et rigoureuse, mais on est capables d'accueillir jusqu'à 18 000 personnes pour voter sans problème», confie M. Martin.

La FTQ-Construction a entre autres été secouée par la controverse entourant les dépenses exagérées de son ancien directeur général, Jocelyn Dupuis. Il a dû quitter, à la demande du président de la FTQ, Michel Arsenault. Une nouvelle direction a été élue, mais le camp du candidat défait reste insatisfait. Ses partisans ont d'ailleurs manifesté devant la FTQ-Construction.

Impressions syndicales

Malgré ce brouhaha entourant la FTQ-Construction, son nouveau directeur général Richard Goyette reste optimiste. Il croit que les ouvriers sauront faire la part des choses.

Étonnamment, M. Goyette ne pense pas perdre de membres. «Ultimement, non. Il peut y avoir de l'insatisfaction, mais je pense que quand ça va être le moment du vote, les gens vont penser aux services qu'ils ont. Ultimement, le travailleur qui va voter fait-il le bilan de l'hypothétique, des problèmes ou des petits tours de bateau - auxquels je n'ai pas participé d'ailleurs - ou il va se dire «qui me donne le service'? Ca se joue un peu comme ça: qui me donne le service.»

Son principal rival, le Conseil provincial, affirme qu'il ne versera pas dans la publicité négative contre la FTQ-Construction, durant la campagne de maraudage qui vient de commencer. «On a-t-y besoin de le faire? Ils le font tout seuls! On n'a pas besoin de faire ça. Dans la vie, je ne pense pas qu'on peut se monter en descendant les autres. Ils se sont descendus tout seuls. Ils sont affaiblis. Le mot d'ordre, chez nous, c'est de vendre nos services, de démontrer qu'on est une organisation qui est saine, dont la gestion est correcte», lance le directeur général Donald Fortin, qui vante aussi son code d'éthique et ses «livres ouverts».

Le maraudage puis le vote sont déterminants, parce que la loi prévoit que la convention collective couvrant l'ensemble des ouvriers doit être négociée par un syndicat ou une alliance de syndicats représentant la majorité absolue des ouvriers, soit 50 pour cent plus un.