Des groupes de protection des réfugiés craignent que le plan du gouvernement Harper n'entraîne une réaction semblable à celle de 2002.

Il y a six ans et demi, l'Algérie est devenue le dernier pays que le Canada a retiré de sa liste de moratoires. La suspension temporaire de renvois était en place depuis 1997. L'opinion publique s'est soulevée contre la décision du ministre de l'Immigration de l'époque, Denis Coderre.

Des manifestations qui ont rassemblé plusieurs centaines de personnes ont eu lieu au centre-ville de Montréal et une famille, les Seddiki-Bourouisa, a trouvé refuge dans une église du quartier Saint-Henri.

«Certains ont été renvoyés en Algérie. Mais les deux ordres de gouvernement, Québec et Ottawa, ont plié et créé un programme qui, au bout du compte, a régularisé plus de 90% de ces ressortissants-là», a souligné à La Presse Rick Goldman, coordonnateur du Comité d'aide aux réfugiés, de Montréal.

En 2002, quelque 1000 Algériens étaient touchés par la décision. Cette fois-ci, on parle de plus de 6000 personnes, selon les documents de l'Agence des services frontaliers obtenus par La Presse.

«Si jamais le gouvernement agissait rapidement, ce serait le genre d'hystérie collective que l'on a vu avec les Algériens», a mis en garde M. Goldman.

Dans leur campagne «Des vies en suspens», des organismes de protection des réfugiés réclament depuis plusieurs années que le gouvernement fédéral accorde la résidence permanente aux ressortissants de pays sous moratoire qui restent au Canada pendant plus de trois ans.

Situation précaire

Ces gens sont souvent dans une situation précaire. Si, par exemple, ils se voient refuser l'asile au Canada, mais ne peuvent retourner chez eux, ils se retrouvent dans un flou juridique, où ils peinent souvent à trouver un emploi, entre autres désavantages.

«On s'est toujours dit qu'ils n'allaient plus annoncer la levée d'un moratoire sans avoir prévu quelque chose pour les gens qui sont là depuis longtemps», a soupiré Janet Dench, directrice du Conseil canadien pour les réfugiés.

«Pour nous, c'est vraiment une façon à l'envers de faire les choses, a-t-elle ajouté. On fait attendre les gens pendant des années et des années dans une espèce de vide juridique, et là quand on dit: on va les renvoyer chez eux, finalement, on commence à leur offrir la résidence permanente... De toute évidence, le gouvernement fait primer l'économie sur l'humanisme.»