À moins que de nombreux démocrates n'aillent pas voter par excès de confiance, Barack Obama sera le prochain président des États-Unis, croit Raymond Chrétien, ancien ambassadeur du Canada à Washington. Son élection promet des chambardements dans la politique étrangère canadienne.

Le Canada pourrait même être obligé de menacer de taxer les exportations d'énergie vers les États-Unis, afin de protéger l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

«Les États-Unis seront fort probablement plus protectionnistes», a déclaré M. Chrétien, qui est le neveu de l'ancien premier ministre Jean Chrétien, lors d'une allocution devant l'Association des MBA du Québec, dans un hôtel du centre-ville. «Il va falloir être très vigilants et examiner chaque loi sous cet aspect pour être prêt à les combattre. Je ne pense pas qu'Obama va vraiment vouloir rouvrir l'accord, même s'il l'a dit. Des procédures au niveau de l'environnement et de la protection des ouvriers américains suffiront, comme elles ont suffi en 1993 pour le président Clinton. Nous sommes l'un des principaux fournisseurs d'énergie des États-Unis. Nous pourrions évoquer des taxes à l'exportation, et cette idée va le refroidir dans son désir de rouvrir l'ALENA.»

Habituellement, les nouveaux présidents américains n'entrent réellement en fonction qu'en janvier. Mais selon M. Chrétien, le prochain président se mettra probablement au travail dès novembre, à cause de la crise financière. «Il va peut-être faire un discours important en politique étrangère, peut-être sur Guantanamo ou la torture, selon mes informations. Il fera aussi des voyages, et si c'est le cas, il sera important que le premier ministre canadien l'invite parmi les premiers, ou carrément offre d'aller le rencontrer à Washington. Il faudra bouger vite et se rapprocher du prochain président et de son entourage.»

Présence militaire

L'un des principaux atouts du Canada est sa participation dans les combats en Afghanistan. «Il faut convaincre les États-Unis que nous sommes un allié important en Afghanistan et un partenaire dans la sécurité des frontières. Obama a dit qu'il va sortir de l'Irak et augmenter le nombre de soldats en Afghanistan.»

M. Chrétien ne croit pas qu'il soit possible d'éviter une présence militaire importante en Irak en 2012, à la fin du premier mandat du prochain président, à la fois à cause de la menace nucléaire en Iran et parce que l'Irak pourrait sombrer dans la «violence confessionnelle» sans les GI américains.

Autre raison pour une relation étroite avec le prochain président, les deux candidats seront plus «verts». «Le Canada devra surveiller l'évolution de la position américaine sur les changements climatiques pour ne pas se retrouver dans le peloton de queue au sommet de Copenhague à la fin 2009.»

Les «meilleurs cerveaux»

Chose certaine, s'il est élu président, M. Obama aura accès aux «meilleurs cerveaux» du pays. «On a dit que Warren Buffett pourrait être le secrétaire du Trésor. Je doute qu'il accepterait, mais il est certain qu'on se presse aux portes.»

Même s'il est ami avec M. McCain -»nous sommes à tu et à toi»- M. Chrétien pense que l'élection de M. Obama serait «historique».

«Avec un président noir et deux femmes parmi les principaux candidats à la présidence et la vice-présidence, les États-Unis prendraient de l'avance sur les grandes démocraties.»